Bangkok – Jusqu’où, jusqu’à quand la PAD (Alliance du peuple pour la démocratie) pourra t-elle maintenir sa stratégie de tension et de provocation dans les rues de Bangkok ? En moins d’une semaine, deux grenades lancées sur les militants de la PAD ont fait deux morts et plus d’une trentaine de blessés graves. Les responsables de la PAD ont aussitôt pointé du doigt les forces pro gouvernementales comme responsables de ces attentats. Mais d’une certaine façon l’escalade la violence dans les rue de Bangkok fait le jeu de la PAD qui n’a pas d’autres stratégies que l’intervention des militaires pour sortir la Thaïlande de l’impasse.

Mais l’armée a répété à plusieurs reprises qu’un nouveau coup d’État militaire ne règlerait pas les problèmes politiques de fond de la Thaïlande, et il est peu probable que les généraux changent d’avis, à moins qu’une importante éruption de violences change la donne. C’est bien entendu la dessus que compte la PAD pour remporter, au moins à court terme, une victoire tactique. « L’histoire ne se répète pas, elle bégaye » , écrivait Karl Marx, mais à Bangkok elle pourrait bien se répéter, du moins en apparence, car la PAD a choisi de prolonger son mouvement en empêchant l’accès au parlement, ce qui avait provoqué le 7 octobre dernier des affrontement mortels avec la police.

Une nouvelle intervention des généraux est peu probable

Mais à plus long terme quelle peut- être la stratégie de la PAD ? Même si elle finissait par obtenir gain de cause sur sa principale revendication, la démission de l’actuel gouvernement, il ne fait aucun doute que l’organisation de nouvelles élections entrainerait une nouvelle victoire du PPP, le parti pro Thaksin. Quoi qu’il arrive, la Thaïlande est susceptible de rester divisée entre les ruraux et les classes défavorisées urbaines  qui soutiennent Thaksin Shinawatra, et les classes moyennes et supérieures, que prétend représenter la PAD. Le fait est que le bilan des années Thaksin reste encore à faire.

Beaucoup de thaïlandais sont en réalité mitigés au sujet de Thaksin. D’un côté, ils n’aiment pas son côté politicien corrompu et autocratique, qui a exploité le système politique thaïlandais pour servir ses propres intérêts. D’un autre côté, ils admirent l’héritage économique Thaksin : celui-ci a amélioré les conditions de vie des pauvres ruraux et urbains et réalisé ce que la classe politique thaïlandaise n’avait jamais réussit à faire. Mais en distribuant concessions et prébendes à des hommes d’affaires amis, l’ancien magnat des télécommunications avait acquis une influence financière considérable.  Comme tous ses prédécesseurs, Thaksin Shinawatra s’est forgé un réseau d’affidés et s’est lui-même beaucoup enrichi, accordant à sa famille et ses proches des intérêts dans tous les secteurs importants de l’économie. A la fin de son mandant, la dérive autocratique du régime Thaksin était patente avec toutes sortes de procédures pour museler la presse indépendante et à rendre inaudible l’opposition.

Mais malgré cette dérive et les abus de pouvoir, Thaksin a conservé une immense popularité et le verdict des urnes a toujours clairement penché en sa faveur. La PAD devra un jour ou l’autre se résigner à en tenir compte, à moins de considérer le système démocratique comme inadapté à la Thailande.

1 comment
  1. Merci pour vos articles, bien complets, bien rédigés et bien informés (à mes yeux)! Ca change des articles des grandes agences ou des journaux francais, bourrés d’approximations et/ou de raccourcis trompeurs. Je viens de découvrir votre site et j’apprécie le sérieux de l’information 🙂

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