C’est un peu paradoxal, mais l’armée est tellement présente en Thaïlande que lorsqu’elle fait preuve d’une relative discrétion, elle ne fait que renforcer les inquiétudes quant à sa possible intervention,  tout en suscitant une avalanche d’invérifiables spéculations.

Les rumeurs de coup d’Etat sont fréquentes en Thaïlande, mais cette fois c’est le gouvernement lui même qui est à l’origine d’une insistante rumeur qui implique l’armée : le but inavoué de l’occupation de Bangkok, qui doit débuter à partir du 13 janvier pour une durée indéterminée, serait de créer les conditions pour une intervention militaire.

En d’autres termes :  un coup d’Etat serait en préparation pour déposer l’actuel gouvernement, avec la complicité du PDRC (le mouvement anti-gouvernemental dirigé par M. Suthep Thaugsuban).

YingluckMilitary
La Premier ministre Yingluck Shinawatra en compagnie de hauts gradés de l’armée : premier à gauche en costume, le général Yuthasak Sasiprapa, vice ministre de la défense. Premier à droite, en uniforme, le général Prayuth Chan-ocha, actuel chef de l’armée. Photo : https://www.facebook.com/Y.Shinawatra

Le Parti Pheu Thai, via Sunisa Letphakkawat, porte-parole adjointe du gouvernement intérimaire, a lancé la semaine dernière les spéculations  sur un « plan secret » du PDRC pour encourager l’armée à organiser un coup d’Etat. Argument supplémentaire et considéré comme hautement significatif : Mme Sunisa ajouté que le 14 janvier a été designé par l’astrologue du PDRC comme un jour de bon augure pour un putsch militaire.

Les rumeurs d’une intervention militaire ont ensuite gagné en intensité après que l’armée a annoncé un important plan de transport de troupes, d’hélicoptères et d’autres armements lourds tels que de l’artillerie et des chars, en provenance des provinces vers Bangkok cette semaine. Mais selon le journal Khaosod il ne s’agirait que des préparatifs pour la journée des enfants qui tombe cette année le 11 janvier. Un défilé est également prévu le 18 janvier, jour de commémoration de l’armée royale thaïlandaise.

Un coup ça va, deux coups …..

Jusqu’à présent l’armée thaïlandaise est restée très en retrait par rapport aux événements qui agitent Bangkok depuis plus d’un mois. Échaudée par son expérience de 2006, elle semble plutôt réticente à s’engager de nouveau de manière ouverte dans la vie politique.

Son intervention en 2006 pour déposer le frère de l’actuel Premier ministre, Thaksin Shinawatra, avait suscité une condamnation quasi unanime de la communauté internationale, sans véritablement réussir à atteindre son but.

Sept ans après le coup d’Etat de 2006, Thaksin dirige toujours la Thaïlande et reste au centre de toutes les spéculations quant à l’avenir politique du pays.

« L’armée ne veut pas utiliser son pouvoir pour forcer les gens à faire des choses », a déclaré le général Prayuth au cours d’une conférence de presse la semaine dernière.

« Nous n’avons pas à demander au Premier ministre de démissionner. »

a t-il ajouté sans toutefois exclure complètement la possibilité d’un coup d’Etat avec une formule elliptique.

« La porte n’est ni ouverte, ni fermée. Tout dépendra des circonstances »

De son coté Yingluck Shinawatra a déclaré dimanche qu’elle était inquiète des troubles qui pourraient se produire à partir du 13 janvier, tout en réaffirmant sa volonté de tenir les élections à la date prévue.

« L’élection ne peut pas être une panacée pour résoudre les problèmes immédiatement, mais l’élection est le meilleur remède pour aider à résoudre les conflits dans le cadre du système démocratique »

a déclaré Mme Yingluck dans un post sur sa page Facebook.

Une force de dialogue ?

Mme Yingluck Shinawatra a récemment demandé au général Prayuth et à l’armée de l’aider à mettre en place un dialogue avec M. Suthep qui dirige les manifestations. Mais cette offre n’a pas été suivie d’effet. De leur coté les chemises rouges ont menacé le pays d’un pandémonium géant si l’élection est empêchée, ou si l’armée intervient.

Le général Prayuth Chan-ocha, a pris ses fonctions de commandant de l’armée royale thaïlandaise en octobre 2011. Il est alors rapidement devenu l’adversaire de l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra et des “chemises rouges”.

Le quotidien Bangkok Post annonçait alors une « implication plus forte de l’armée dans la politique ». En effet, le chef de l’armée a souvent eu son mot à dire et se fait régulièrement entendre sur les sujets impliquant la royauté ou la politique.

Lors des précédentes élections législative de juillet 2011, le général Prayuth Chan-Ocha avait appelé les électeurs  à voter pour les « bonnes personnes »,  afin de «protéger la monarchie et changer le pays pour le mieux».

Lire aussi Le général Prayuth compte avoir le dernier mot – armée – thailande-fr
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2 comments
  1. Dommage qu on ne peut pas parler des silences des  » bip » ,ca expliquerait le pourquoi et le comment de ce qui se passe aujourd hui dans le Royaume.

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