L’affaire des prisons clandestines de la CIA avait été révélée par le Washington Post en novembre 2005 et fermement démentie par le gouvernement de l’époque. Aujourd’hui un nouveau témoignage vient relancer le débat.

Le Washington Post a rapporté hier que le chef de la station de la CIA à Bangkok a envoyé un câble classé top secret à la fin de 2005, qui demande la permission de détruire les bandes vidéo « enregistrées dans les prisons secretes de la CIA en Thaïlande, qui montreraient des agents de renseignements utilisant la noyade simulée pour extraire des informations de suspects membres d’al-Qaïda ».

L’Afghanistan et plusieurs pays d’Europe de l’Est, ainsi qu’un centre à la prison de Guantanamo Bay à Cuba, ont également fait partie de ce système clandestin.

La Thaïlande était un élément du « réseau mondial de détention clandestin [qui] est un élément central de la guerre non conventionnelle de la CIA contre le terrorisme. » avait signalé le quotidien américain, dans son édition du 2 novembre 2005.

Le rapport avait provoqué un tollé international, mais a été démenti par Bangkok. Le premier ministre Thaksin Shinawatra avait rappelé, que, « dans un seul cas » , une coopération effective et revendiquée entre les services des deux pays avait eu lieu, en août 2003, avec l’arrestation de l’Indonésien Hambali ; considéré comme l’un des chefs d’un réseau terroriste islamiste régional, il avait été remis aux services américains. La Thaïlande aurait demandé la cessation de toute activité secrète de cette sorte en 2003, selon le Washington Post .

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Tharit Charungvat a rejeté le rapport, en disant qu’il était sans fondement. « Nous avons vérifié avec tous les organismes de sécurité et ils ont confirmé qu’il n’y avait aucune installation de ce genre en Thaïlande », a t-il dit.

A Washington un haut membre du comité, a déclaré après une réunion de quatre heures avec John Rizzo, que celui qui a donné l’ordre de détruire les bandes vidéo, a apparemment agi contre la direction de ses supérieurs.

Sur les bandes vidéo on pouvait voir l’intérrogatoire de deux responsables d’Al-Qaida: Zayn Al-Abidin Mohammed Hussein, alias Abu Zubaida et Abd al-Rahim al-Nashiri, qui avaient été capturés par les forces américaines en 2002.

Elles montrent Zubaida torturé avec la technique du « waterboarding », qui implique que le prisonnier soit attaché à une planche, puis on lui verse de l’eau sur le nez et la bouche, ce qui crée la sensation de noyade imminente. Les services de renseignement, la CIA s’inquiétait de la nature brutale des images de ces «interrogatoires poussés», et du fait qu’elles puissent exposer ses agents aux rigueurs de la justice.

Ces «techniques d’interrogatoires poussés» avaient à l’époque le feu vert de l’administration Bush, sur la base de deux décisions – depuis abrogées sous la pression de l’opinion publique. En février 2002, le président Bush avait signé un «ordre exécutif» (décret) affirmant que l’article 3 de la convention de Genève interdisant «les mutilations, les traitements cruels et la torture» ne s’appliquait pas aux captifs soupçonnés d’appartenir à Al-Qaeda ou aux talibans, qualifiés d’«ennemis combattants». Peu après, le ministre américain de la Justice prohibait en théorie la torture tout en la légalisant en pratique, en définissant celle-ci, dans un mémorandum interne, comme une douleur physique d’un degré extrême équivalent à celle ressentie par quelqu’un au seuil de la mort.

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