La campagne pour les élections législatives du 23 décembre s’ouvre officiellement cette semaine en Thaïlande, marquant le premier scrutin parlementaire depuis le putsch militaire du 19 septembre 2006. Des rumeurs de coup d’Etat (aussitôt démenties comme toujours) ont déjà circulé sur une éventuelle nouvelle intervention des militaires, au cas où les partisans de l’ex premier ministre Thaksin, remporterait la majorité des sièges.

Le référendum du 19 août dernier, a donné à la Thaïlande une nouvelle Constitution considérée comme un retour en arrière par rapport à la précédente, car susceptible de favoriser des gouvernements de coalition instables et un renforcement de l’influence des militaires, et des fonctionnaires, au détriment des partis politiques et des élus.

L’indifférence de la population Thailandaise pour sa nouvelle constitution a quelque chose de surprenant pour nous, mais elle s’explique assez facilement par un chiffre : depuis 1932, la Thailande a connu 18 constitutions, soit environ une tous les quatre ans.

 

Un ami thaï a qui je faisais cette remarque m’a répondu la chose suivante : “Ici les constitutions servent d’abord à régler les conflits entre les factions qui se partagent le pouvoir. En Thaïlande ce n’est pas la constitution qui doit protéger le peuple contre les abus de pouvoir du gouvernement : c’est le Roi qui se charge de ça.”

Ces élections sont censées aboutir au rétablissement de la démocratie mais la loi martiale reste en vigueur dans une bonne partie du pays, notamment dans des régions rurales du Nord où le Premier ministre renversé Thaksin Shinawatra était très populaire.

La Commission électorale, nommée par les militaires, a approuvé le mois dernier des règles assez strictes pour la campagne, qui rendent les candidats vulnérables, au moindre dérapage.

Une rigueur qui s’explique sans doute par le bilan décevant de l’actuel gouvernement qui a multiplié les bourdes et les erreurs de communication, provoquant la panique à la Bourse de Bangkok, l’attentisme préoccupant des investisseurs étrangers et la méfiance des citoyens. Dommage car au départ il disposait de beaucoup d’ atouts : un des pays les plus prometteurs d’Asie du Sud-Est, des technocrates compétents, le soutien du Roi et de la population (du moins au début).

En décembre 2006, l’annonce du blocage des nouveaux dépôts en devises étrangères fait chuter la bourse de 15% et oblige le gouvernement à se rétracter. Puis en janvier 2007, c’est la réforme du Foreign Business Act qui laisse les investisseurs étrangers dans le brouillard.

Dans les secteurs désignés par le FBA, une entreprise sera considérée comme « étrangère » lorsque les investisseurs étrangers contrôlent plus de 49% des actions ou des votes. Mais derrière cette mesure, plusieurs objectifs se dessinent. Un objectif avoué : celui d’empêcher les étrangers de contrôler, par l’usage généralisé des prête-noms, des industries considérées comme « stratégiques » pour le pays. Un objectif inavoué : celui de « punir » la Temasek Holding singapourienne en l’obligeant à revendre une partie de l’entreprise Shin Corp. La vente de cette entreprise, conclue par la famille Thaksin sans payer les « impôts sur les sociétés », avait provoqué le début de la chute politique de l’ancien Premier ministre.

Du côté des investisseurs étrangers, l’attentisme est donc de règle. On préfère différer les investissements, en espérant la confirmation des prochaines élections générales. Même chose sur le marché immobilier qui enregistre un attentisme généralisé de la part des investisseurs étrangers. Du coup le climat d’incertitudes qui plane sur la Thaïlande commence à peser sur la croissance du pays qui a déjà été revue plusieurs fois en baisse.

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