Reporters sans frontières salue l’initiative du journaliste en ligne Frank G. Anderson, qui a porté plainte, le 20 mars 2010, contre les deux individus qui ont intenté une action en justice à son encontre, pour avoir évoqué un supposé crime de lèse-majesté. C’est le premier cas porté à la connaissance de l’organisation d’un professionnel des médias qui réagit à des accusations liées au lèse-majesté en contre-attaquant en justice
« Nous dénonçons depuis longtemps les abus du crime de lèse-majesté et son intrumentalisation politique, qui restreignent la liberté d’expression dans le royaume. Le fait que, pour une fois, un journaliste poursuivi pour avoir évoqué ces questions décide de poursuivre en justice ses accusateurs constitue un test important pour la justice thaïlandaise. Cette dernière doit faire preuve d’objectivité et ne pas manquer cette occasion d’envoyer un avertissement à ceux qui recourrent au lèse-majesté et à la diffamation de manière abusive afin d’intimider les journalistes »
a déclaré l’organisation de défense de la liberté de la presse, basée à Paris.
Frank G. Anderson a été convoqué par la police en février et en mars 2010, afin de répondre de plaintes en diffamation déposées à son encontre par un consultant britannique, Akbar Khan, puis par le lieutenant-colonel de police Wattanasak Mungkitkarndee, suite à des articles publiés sur son site d’informations The Korat Post (lien) en décembre 2008 : il y rappelait que ces deux hommes sont connus pour avoir déjà porté plainte pour lèse-majesté contre des journalistes, comme l’ancien correspondant de la BBC, Jonathan Head, ou des opposants comme Jakrapop Penkair. Il soulignait que leurs actions ne reposaient sur aucune preuve et qu’elles étaient en contradiction avec les déclarations du roi selon lesquelles il n’était pas au-dessus des critiques.
Depuis le dépôt de leurs plaintes, respectivement en décembre 2008 et en mars 2009, les deux hommes n’ont pas cherché à contacter le journaliste pour lui demander de retirer le contenu incriminé. Il a cependant enlevé les articles concernés après avoir pris connaissance de la nature des poursuites. Frank G. Anderson a décidé de riposter et de poursuivre les deux individus en vertu des articles 137, 172 et 179 du code pénal thaïlandais, pour diffusion de fausses informations à des représentants de l’Etat au sujet d’un délit.
Par ailleurs, les distributeurs du magazine britannique The Economist ont annulé la diffusion en Thaïlande du numéro en date du 18 mars 2010, qui contient un long article sur la situation dans le pays. Intitulé « As father fades, his children fight », le reportage analyse le problème de la succession du roi actuellement hospitalisé au regard de la crise politique que traverse le pays. Selon l’agence Reuters, il s’agit de la quatrième fois depuis décembre 2008 que The Economist est censuré ou s’autocensure dans le royaume. Une victime de plus du harcèlement judiciaire lié au lèse-majesté.
Au moins une dizaine d’internautes et de journalistes sont poursuivis pour crime de lèse-majesté. Le blogueur Suwicha Thakor est actuellement emprisonné après avoir été condamné le 3 avril 2009 à dix ans de prison pour avoir envoyé par Internet des images jugées choquantes du roi et de son héritier. Il a été arrêté en janvier 2009 par le Département d’enquêtes spéciales (DSI). Il clame son innocence. La Thaïlande fait partie de la liste des « Pays sous surveillance » dans le rapport de Reporters sans frontières sur les « Ennemis d’Internet » publié le 12 mars 2010.
Lucie Morillon, Responsable du bureau Nouveaux médias Reporters sans frontières
2 comments
Comment peut il y avoir « trop de liberté d’expression »? La connaissance et le respect de la culture d’un pays doivent ils provoquer une autocensure de l’écrivain?
La liberté d’expression? Il y en a trop en Thailande. La culture de chaque pays est differente. Regardez et critiquez sans comprend les comportements des individus dans ce pays donne une vision totallement fausse. Domage pour Frank G. Anderson.
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