Tout un symbole : la Birmanie, jadis lanterne rouge de la liberté de la presse, et souvent de la liberté tout court, se rapproche de plus en plus (151e) de la Thaïlande (135e) après avoir fait un bond de 18 places cette année dans le rapport annuel 2013 de Reporters sans frontières.
Seuls trois pays du continent asiatique figurent dans le premier quart du tableau, tandis que 15 pays en occupent les 45 dernières places, note RSF.
La Thaïlande en fait malheureusement partie, même si elle progresse de deux places en 2013 au 135e rang.
La Birmanie a connu des changements spectaculaires en 2012 et figure désormais au 151ème rang, soit une progression de 18 places, loin devant ses habituels « voisins » répressifs à l’encontre de la presse. Plus aucun journaliste ni cyberdissident n’est emprisonné dans les geôles de l’ancienne dictature militaire.
note RSF.
On ne peut pas en dire autant de la Thaïlande, où les condamnations pour lèse-majesté pleuvent, et toujours avec des peines très lourdes, allant de 5 à 10 ans d’emprisonnement.
Récemment la justice thaïlandaise s’est engagée sur un chemin tendancieux, voire franchement orwellien, en condamnant à dix ans de prison le rédacteur en chef d’un magazine qui avait publié deux articles mettant en scène un personnage imaginaire, que les juges ont identifiés comme étant trop proche du monarque.
L’ex rédacteur en chef du magazine bimensuel Voice of Thaksin, Somyot Prueksakasemsuk, a été condamné par la Cour pénale de Bangkok, le 23 janvier 2013 à 10 ans de prison.
Le journaliste a été reconnu coupable de “lèse-majesté » pour avoir publié en 2010 deux articles, dont il n’est pas l’auteur, jugés diffamatoires envers le roi et la monarchie ayant enfreint l’article 112 du code pénal thaïlandais, qui stipule que « celui qui diffame, insulte ou menace le roi, la reine, l’héritier au trône, ou le régent, encourt une peine de prison de trois à quinze ans ».
Cette condamnation n’est ni plus ni moins qu’une manœuvre politique pour faire taire une voix critique à l’encontre du gouvernement. Le fait que la plainte concernant les articles ’diffamatoires’ n’ait été déposée que plusieurs mois après l’arrestation de Somyot Prueksakasemsuk, est la preuve même que le pouvoir voulait sa tête et qu’il lui manquait juste un prétexte pour l’emprisonner »,
avait alors déclaré Reporters sans frontières.
« Nous exigeons l’annulation de cette condamnation et la remise en liberté immédiate de Somyot Prueksakasemsuk. Nous appelons l’ensemble de la communauté internationale à réagir face à ce jugement qui constitue une attaque directe contre la liberté de la presse en Thaïlande. La loi sur la lèse-majesté et son article 112 du code pénal doivent être abrogées », a ajouté l’organisation.
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Chine, Vietnam, Laos, Corée du Nord : statu quo
Dirigés par des partis autoritaires, la Corée du Nord (178ème), la Chine (173ème), le Vietnam (172ème) et le Laos (168ème), refusent toujours d’accorder à leurs citoyens la liberté d’être informés. Le contrôle de l’information est un enjeu de taille pour ces régimes effrayés par la perspective d’être ouvertement critiqués. Au pouvoir depuis le 30 décembre 2011, Kim Jong-un perpétue la politique de son père, Kim Jong-il, et semble gouverner de concert avec la junte militaire.
Au Vietnam et en Chine, les acteurs de l’information en ligne, blogueurs et net-citoyens, font face à une répression toujours plus forte. Nombreux sont les moines tibétains condamnés ou kidnappés pour avoir transmis à l’étranger des informations sur la situation catastrophique des droits de l’homme qui prévaut dans cette région de l’ouest du pays. Les médias privés et la presse étrangère continuent d’être régulièrement censurés par le département de la propagande.
Face à la montée en puissance des réseaux sociaux et leur capacité mobilisatrice, les autorités ont redoublé d’effort afin d’affûter la surveillance des contenus « sensibles », immédiatement retirés de la Toile. En moins d’un an, la justice vietnamienne a condamné 12 blogueurs et cyberdissidents à des peines allant jusqu’à 13 ans d’emprisonnement, faisant du pays la deuxième prison du monde pour les net-citoyens, derrière la Chine.
Dégradation généralisée en Asie du Sud
Le sous-continent indien est la région d’Asie qui observe la plus forte dégradation du climat pour les acteurs de l’information en 2012. Aux Maldives, qui s’effondrent à la 103ème place (-30), les évènements qui ont provoqué la démission du président Mohammed Nasheed, en février 2012 se sont accompagnés de violences et de menaces ciblant les journalistes de la télévision publique et les médias privés jugés pro-Nasheed par les putschistes.
Depuis, les atteintes à la liberté de la presse se sont multipliées : de nombreux professionnels des médias ont été arrêtés, agressés ou intimidés en marge de manifestations. Le 5 juin 2012, le journaliste indépendant et blogueur Ismail “Hilath” Rasheed a survécu in extremis à la première tentative de meurtre commise sur un journaliste dans l’archipel.
Quatre journalistes ont été tués en 2012 en Inde et au Bangladesh, qui chutent respectivement à la 140ème et 144ème place du classement. Dans la « plus grande démocratie du monde », les autorités s’obstinent à censurer le Net et instaurer de plus en plus de tabous sur la Toile, alors que s’installe un climat d’impunité pour les auteurs de violences à l’encontre des médias et que s’accroit l’isolement des régions du Cachemire et du Chhattisgarh. Le Bangladesh n’est pas en reste. Les journalistes y font régulièrement l’objet de violences policières.
Quand elles ne perpètrent pas des agressions, les forces de l’ordre, par leur passivité, contribuent à l’impunité dont jouissent les ennemis de la presse, trop rarement traduits en justice. Les meurtriers et les commanditaires du double meurtre des journalistes Sagar Sarowar et Meherun Runi, n’ont pas été appréhendés et l’enquête, cyniquement confiée aux forces spéciales Rapid Action Batallion, en est toujours au point mort. Les conditions de travail des journalistes au Pakistan (159ème, -8) et au Népal (118ème, -12) continuent de se dégrader, en l’absence de politique gouvernementale de protection de la presse.