Reporters sans frontières et son organisation partenaire, la Burma Media Associa tion (BMA), condamnent avec la dernière énergie le retour de la censure en Birmanie, opéré par la Division d’enregistrement et de vérification de la presse (Press Scrutiny and Registration Division, PSRD).
Le 31 juillet 2012, le “bureau de la censure” a suspendu indéfiniment la publication des hebdomadaires The Voice et The Envoy, pour violation de l’Ordonnance no. 44 de 2011 (2011 Order no. 44) » et infraction aux règles de la PSRD, notamment la publication d’articles n’ayant pas été visés par l’organe gouvernemental de censure.
“Les mesures prises par la PSRD confirment les doutes que nous avons émis, à maintes reprises, au cours des derniers mois. Il est évident qu’une partie du gouvernement, à tout le moins certains de ses membres les plus influents, s’évertue à maintenir un contrôle strict sur les médias. Ni le ministère de l’Information, ni la PSRD, ne sauraient justifier ces suspensions en invoquant la nature transitionnelle de la période en cours. Les sanctions drastiques à l’encontre de la presse doivent être levées une bonne fois pour toutes”,
ont déclaré Reporters sans frontières et la Burma Media Association.
“Nous appelons la PSRD à annuler la suspension de publication de The Voice et The Envoy, et à mettre fin à sa politique dissuasive qui n’a pour conséquence que l’accroissement de l’autocensure des professionnels des médias”, ont ajouté les organisations.
Selon un responsable de la PSRD, interrogé par The Irrawaddy, l’interdiction de The Voice a été imposée en raison de la publication, en Une, d’un article sur un remaniement ministériel, mentionnant cinq ministres en poste, et d’une caricature.
L’œuvre, du caricaturiste Shwe Bo, apparait sur la photo de couverture de l’hebdomadaire. Celle-ci montre des officiels du ministère de l’Information en train d’examiner la caricature, au cours d’une exposition organisée par Daw Khin Kyi Fondation le 26 juillet 2012, à Rangoun. Le dessin humoristique, qui compare les médias à un éléphant enchaîné, a par la suite été banni de l’exposition.
The Envoy s’est vu interdit de publication après avoir partiellement publié un article sur le remaniement ministériel, ainsi qu’une interview accordée par un parlementaire birman à l’hebdomadaire chinois Southern Weekly.
Le 31 juillet, le vice directeur général de la PSRD, Tint Swe, et le directeur général, Myint Maung, ont convoqué les éditeurs de tous les hebdomadaires, afin de leur rappeler les règles fixées par la PSRD et la loi de 1962 sur les éditeurs et les imprimeurs.
Tint Swe a déclaré que l’hebdomadaire The Voice avait publié huit nouvelles sans les soumettre à la commission de censure. The Envoy aurait publié sept articles sans autorisation.
S’adressant à The Irrawaddy, Thar Lun Zaung Htet, rédacteur en chef en charge de l’hebdomadaire Venus News, a déclaré : « Nous craignons également de publier des informations. Nous sommes inquiets pour notre avenir. »
Plus de 90 journalistes basés à Rangoun, et appartenant à différentes organisations de journalistes, ont participé à une réunion d’urgence, organisée par Zaw Thet Htwe, actuel dirigeant de la Myanmar Journalists Union.
Lors de ce rassemblement, un Comité de la liberté de la presse a été instauré : Zaw Thet Htwe a été nommé porte-parole de ce comité, qui a publié une déclaration en sept points envoyé ensuite au président Thein Sein. Celle-ci demanderait notamment au gouvernement de :
_permettre la publication des revues suspendues,
_démettre de leurs fonctions les officiels considérés comme responsables des restrictions imposées aux médias
Les journalistes avertissent par ailleurs qu’ils ne reconnaitront aucune loi sur les médias élaborée par les autorités si les journalistes ne sont pas correctement consultés durant le processus de rédaction.
Afin de faire cesser les violations de la liberté de presse, le Comité demande également à s’entretenir avec le président Thein Sein.
Reporters sans frontières et la Burma Media Association soutiennent les demandes exprimées par le Comité de la liberté de la presse.
Les organisations s’inquiètent des récentes restrictions de la liberté de la presse et des attaques répétées par le gouvernement contre les médias. Le mois dernier, le journal Snapshot a été suspendu par la PSRD pour avoir publié la photographie d’une victime de viol (voir rapport). Des poursuites judiciaires sont en cours. The Voice fait également l’objet d’une poursuite en diffamation, intentée par le ministère des Mines. En janvier 2012, un ingénieur du ministère de la construction avait poursuivi le journal Modern Weekly et sa reporter, Thet Su Aung, suite à la parution d’un article, en novembre 2011, critiquant le mauvais état d’une route de la région de Mandalay (Centre).
viaToujours bien présent, le bureau de la censure réprime durement la presse birmane – Reporters sans frontières.