La décision est d’une extrême brutalité. La télévision d’État birmane, MRTV, a annoncé dans son édition de lundi 8 mars au soir que la junte militaire au pouvoir a décidé de suspendre les licences de cinq organes de presse.
Les agences 7 Day News, Democratic Voice of Burma, Khit Thit News, Mizzima et Myanmar Now n’ont désormais plus le droit de publier ou diffuser des articles, des émissions, des reportages ou des messages sur les réseaux sociaux.
Plus tôt dans la journée, les locaux de Myanmar Now à Rangoun ont été sauvagement perquisitionnés par plusieurs dizaines de militaires et de policiers, qui ont fait sauter les cadenas bloquant l’accès aux bureaux.
Les employés de l’agence ne se rendant plus dans les locaux depuis le 28 janvier, lorsque bruissaient les premières rumeurs de coup d’État, aucun journaliste n’a été arrêté durant ce raid. Les forces de sécurité ont en revanche saisi de nombreux document, et du matériel.
Fuite en avant
“Reporters sans frontière appelle les autorités militaires birmanes à rétablir immédiatement les licences des cinq organes de presse interdits, annonce le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. La perquisition opérée dans les locaux de Myanmar Now est un acte d’intimidation, et une intolérable violation du secret des sources. Le conseil de sécurité des Nations unies doit trouver au plus vite un accord pour sanctionner les responsables de la junte au pouvoir et interrompre leur fuite en avant vers une répression totale de la liberté de la presse.”
Contacté par RSF à propos de cette perquisition, le rédacteur en chef de Myanmar Now, Swe Win, confirme qu’il s’attendait à un raid de la sorte depuis le début du putsch, le mois dernier.
« risquer la prison ou la mort”
Selon lui, le niveau de pression auquel les journalistes birmans sont confrontés a atteint un nouveau palier : “Nous sommes maintenant parvenus à un point où le simple fait de vouloir continuer d’exercer notre métier signifie risquer la prison ou la mort.”
Une reporter de Myanmar Now, Kay Zon Nway, a été arrêtée le 27 février dernier, alors qu’elle diffusait en direct une vidéo d’un mouvement de protestation. Elle a été placée en détention provisoire à la prison d’Insein, au moins jusqu’au 12 mars.
Elle fait partie des onze journalistes, au minimum, actuellement maintenus en prison selon le décompte effectué par RSF après un coup de filet lancé par la police il y a dix jours.
La Birmanie se situe actuellement à la 139e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF.