À l’occasion de sa Journée mondiale contre la cyber-censure, le 12 mars 2011, Reporters sans frontières a dressé un état des lieux de la liberté de l’information en ligne. En Asie la Birmanie, la Chine, la Corée du Nord, le Vietnam sont classés parmi les « Ennemis d’Internet ». L’Australie, la Corée du Sud, Sri Lanka, la Thaïlande, la Malaisie sont « sous surveillance ».
« Un internaute sur trois dans le monde n’a pas accès à un Internet libre. Une soixantaine de pays censurent le réseau à des degrés divers ou harcèlent les net-citoyens. Au moins 119 personnes sont emprisonnés simplement parce qu’elles ont utilisé Internet pour s’exprimer librement. Ces quelques chiffres font froid dans le dos.
Alors que le Web a joué un rôle crucial dans les récentes révolutions tunisienne et égyptienne, de plus en plus de gouvernements tentent de manipuler l’information qui circule sur le Net et d’en retirer les contenus critiques.
Il faut, plus que jamais, défendre la liberté d’expression en ligne et protéger les cyberdissidents. Cette journée est aussi l’occasion de rendre hommage à la solidarité dont les internautes font preuve les uns envers les autres »,
a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières.
Les ennemis d’Internet
Reporters sans frontières rend public un rapport d’une centaine de pages qui fait le bilan de la situation de la liberté d’expression en ligne dans les 10 pays qualifiés d’ennemis d’Internet et les 16 pays placés sous surveillance. Les régimes répressifs déploient de multiples efforts pour contrôler les contenus, allant de la censure à la répression physique des acteurs du Web, en passant par la diffusion massive de propagande.
« La Tunisie et l’Egypte ont été retirés de la liste des ennemis d’Internet après la chute des gouvernements en place. Ces pays restent tout de même sous surveillance, au même titre que la Libye. Les acquis de la révolution sont à consolider et les libertés nouvelles doivent être garanties. Nous avons également placé sous surveillance trois démocraties – l’Australie, la Corée du Sud et la France – en raison de différentes mesures qui risquent d’avoir des conséquences négatives pour la liberté d’expression en ligne et l’accès au Web »,
a ajouté le secrétaire général de l’organisation.
Mobilisation sur un site dédié
A l’occasion de cette journée, Reporters sans frontières a conçu un site spécifique (12mars.rsf.org) sur lequel les internautes peuvent télécharger le pictogramme représentant la défense de la liberté d’expression en ligne. Il est également possible de visionner un film réalisé pour l’occasion par l’illustrateur français Joel Guenoun et de consulter la carte des trous noirs du Web.
Les internautes sont appelés à relayer ces informations sur les réseaux sociaux, les blogs et les sites en soutien aux net-citoyens emprisonnés. Ils peuvent utiliser le pictogramme disponible dans une vingtaine de langues (dont le chinois, l’arabe, le birman, le turkmène, le persan et le russe) comme image de leur profil Facebook, Twitter ou des autres réseaux sociaux.
2010, l’année du Web ?
L’année 2010 aura vu la consécration des réseaux sociaux et du Web comme outils de mobilisation et de transmission d’informations. Elle aura été marquée également par une complémentarité grandissante entre médias traditionnels et nouveaux médias, illustrée par le Printemps arabe, mais aussi par la publication des câbles diplomatiques américains par WikiLeaks, en collaboration avec plusieurs médias internationaux.
Internet reste avant tout un outil, utilisé pour le meilleur et pour le pire. Dans les pays les plus cloisonnés, il crée un espace de liberté. Son potentiel de diffusion d’informations irrite les dictateurs et rend inefficaces les méthodes traditionnelles de censure. Le Web est utilisé par les dissidents, mais aussi par les autorités afin de relayer la propagande officielle et de renforcer la surveillance et le contrôle des populations.
La nouvelle stratégie des régimes autoritaires ne rime plus tant avec un blocage pur et dur qu’avec une manipulation et une propagande en ligne. Certes, des pays comme la Chine, l’Arabie saoudite ou l’Iran appliquent toujours un filtrage sévère, qu’ils ont même tendance à accentuer en période de tensions, mais leurs internautes continuent d’apprendre à contourner la censure.
Lucie Morillon
Reporters Without Borders / Reporters sans frontières
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