En théorie, l’entrée en vigueur de l’AEC en 2015 a tout pour plaire : un marché de 630 millions d’individus, avec une union douanière, une libre circulation des capitaux et des services.
De quoi relancer la croissance et le commerce et l’investissement dans une région qui commence à sentir les conséquences du ralentissement de la croissance en Chine.
Mais les besoins sont considérables : une étude du cabinet McKinsey estime que le montant des investissements nécessaires en infrastructures pour la région s’élève à 7 trillions de dollars (voir graphique plus bas).
En pratique le chemin à parcourir reste très important, et bon nombre d’intervenants signalent que 2015 sera davantage le début d’un long processus d’intégration, qu’une date butoir où tous les objectifs de l’AEC seront réalisés.
2015 : le début d’un processus, plutôt qu’une date butoir
L’ASEAN en est encore à ses débuts, et ressemble un peu aux États-Unis en 1776 – selon David Carden, associé en charge de l’Asie au cabinet d’avocats Jones Day, et ancien ambassadeur américain à l’ASEAN.
Si l’ASEAN veut se contruire un avenir, il devra le trouver avec l’ensemble des pays membres.Les défis sont trop grands, la productivité est trop faible, la demande d’infrastructures est trop élevée
David Carden était l’un des six panélistes intervenant à l’ASEAN Investment Summit 2014, qui s’est déroulé en marge du Sommet de l’ASEAN du 11 au 13 novembre à Nay Pyi Taw.
Simon Tay, président de l’Institut des affaires internationales de Singapour, a déclaré qu’il faudra au moins cinq ans avant que la région ne commence à fonctionner comme un marché intégré.
Il est de plus en plus clair que les pays membres de l’ASEAN auront du mal à tenir l’échéance de 2015, et à répondre aux engagements prévus par l’AEC sur l’assouplissement des nombreuses restrictions qui existent encore entre les 10 pays membres.
Une grande partie de la réticence à abandonner les obstacles au commerce et à l’investissement découle d’un désir de protéger les entreprises locales de la concurrence étrangère, une force assez puissante pour amener certains à se demander si une communauté économique intégrée est vraiment réaliste compte tenu des disparités très importantes de la région.
La productivité du travail varie de 1 à 10 entre le Vietnam et la Malaisie, et reste en moyenne très inférieure à celle de la Chine.
Le risque du protectionnisme déguisé
Chaque pays membre a ses propres préoccupations avec des secteurs de l’économie qu’il cherche à protéger, parfois pour des raisons politiques. Par exemple la Thaïlande et l’Indonésie ont jusqu’à la moitié de leurs populations travaillant dans le secteur agricole, un secteur qui contribue relativement peu au PIB total du pays.
Il est exact que les barrières douanières ont généralement été supprimées à travers les pays de l’Asean, mais la présence de barrières non tarifaires demeure un problème important.
a estimé un des intervenants au 11e Forum Asean, organisé par les Conseillers du Commerce Extérieur et l’ambassade France, à l’hotel Pullman de Bangkok le 18 novembre.
Pour le moment, l’Asean ne s’est pas doté d’un organisme de contrôle centralisé, sur le modèle de la CJUE, chargé de faire respecter les règles de la concurrence entre les pays membres.
La comparaison entre les deux strucures est assez éloquente : le siège de l’UE à Bruxelles emploie 33 000 personnes, alors que le secrétariat de l’ASEAN à Djakarta n’a que 300 employés.
Il y a des centaines de langues parlées dans la régionde l’Asean. La langue officielle de travail de l’ASEAN est l’anglais, ce qui fait que des pays tels que Singapour et les Philippines seront beaucoup plus à l’aise que d’autres intervenants tels que la Thaïlande.
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