Cela n’étonnera guère les résidents de longue date, lesquels ont souvent observé que si les hommes font les braves, ce sont les femmes qui tiennent et soutiennent ce charmant pays : la Thaïlande est bien placée, selon les statistiques, en ce qui concerne tant l’intégration dans le milieu professionnel que l’égalité des revenus hommes-femmes.
Avec 38% de femmes occupant des postes à hautes responsabilités dans les entreprises, la Thaïlande figure ainsi dans le Top 10 mondial de la catégorie selon le récent rapport Grant Thornton International Business 2014.
Le royaume affiche même une progression de deux points dans ce domaine par rapport à l’année 2013, alors que certains de ses voisins asiatiques eux reculent, comme le Vietnam (26% avec un recul de 7 points) ou encore la Chine (38% avec une perte de 13 points).
Globalement le marché asiatique est plus favorable aux femmes pour ce qui est de l’accès à des postes à responsabilité que le reste du monde. Dans ces économies qui se développent rapidement, les entreprises recherchent des compétences et des personnes diplômées rapidement. Les femmes profitent de cet état de fait.
L’Asie du Sud en retard sur le terrain de l’éducation des femmes (source Grant Northon International Business Report 2014)« Le milieu des affaires n’a guère de choix. C’est pourquoi les femmes sont plus les bienvenues dans les postes à hautes responsabilités que par le passé »
analyse Tidarat Kanchanawat, directrice régionale Thaïlande/Vietnam pour Adecco.
Le nombre croissant de femmes réalisant des études supérieures en Asie du Sud-est explique en partie ce phénomène. Dans cette partie du monde on compte en moyenne, 74 femmes pour 100 hommes dans les universités. Une progression de 37% depuis 1980 même si la proportion reste relativement faible à l’échelle de la planète. En Thaïlande l’effort est très marqué, le royaume investissant l’équivalent de près de 175 millions d’euros sur 4 ans dans un fond de développement pour les femmes (lequel a toutefois été vivement critiqué pour sa gestion et ses gaspillages).
Une dynamique enclenchée depuis un demi-siècle
L’amélioration de la position de la femme sur le marché de l’emploi thaïlandais a réellement débutée dans les années 1960, date à laquelle le pays est entré dans une phase d’industrialisation. Cette mutation lente du pays a eu deux impacts majeurs.
D’une part une augmentation progressive du nombre de femmes sur le marché de l’emploi avec à la clé une évolution des mentalités. En 2003, elles représentaient 43,5% des personnes actives ; en 2011, cette proportion est passée à 45%. A l’horizon 2020, le pays devrait compter une proportion égale d’hommes et de femmes dans la population active.
La modernisation du pays a aussi permis une migration des femmes des métiers traditionnels de l’agriculture vers les métiers des services ou encore de l’industrie. En 1980, 75% des femmes actives travaillaient dans le secteur agricole, 30 ans plus tard ce secteur n’emploie plus que 40% d’entre elles. Les services (bancaire, hospitalier..) sont très favorables à l’emploi des femmes avec plus de 40% des thaïlandaises actives dans ces secteur contre seulement 10% dans l’industrie.
Une situation à deux vitesses
Malgré une nette amélioration statistique de l’emploi des femmes dans le royaume et de leurs conditions, une forte disparité ville/campagne demeure. Alors que dans les centres urbains le secteur des services représente 70-80% des emplois des femmes, il est important de rappeler que le pays compte plus de 60% de sa population vivant en zone rurale. Dans les campagnes les femmes demeurent souvent employées dans le secteur agricole en l’absence d’autres possibilités. Les campagnes restent aussi relativement ancrées dans la tradition, les femmes occupant donc des rôles plus « classiques » (élever les enfants, travaux domestiques), ce qui ne leur coupe souvent l’accès aux emplois.
Dans les villes, même si les femmes ont plus d’opportunité dans les entreprises que par le passé, une discrimination sexuelle à l’embauche demeure. Elles doivent donc faire preuve davantage de sacrifices que leurs homologues masculins.
« Prenons l’exemple d’un homme et d’une femme en compétition pour un poste de direction. S’ils ont tous deux des qualifications similaires, l’homme est favori. Mais si la femme est plus qualifiée et prouve qu’elle peut travailler dans n’importe quelles conditions, alors elle peut aussi avoir le poste » constate Tidarat Kanchanawat.
Avec une place dans le Top 10 mondial en ce qui concerne la proportion de femmes dans des postes à responsabilité, la Thaïlande peut légitimement être fière. L’évolution douce mais sûre de la situation est le signe d’une modernisation de la culture du pays. Mais d’importantes disparités dans le domaine demeurent et avec 60% d’emplois informels (non déclarés) dans le royaume, les statistiques ne saisissent malheureusement qu’une partie réduite de la réalité du pays.