Le roi de Thaïlande Bhumibol Adulyadej, 78 ans, auquel ne cessent de se référer les auteurs du coup d’État militaire à Bangkok, est immensément révéré par ses sujets qui se tournent systématiquement vers lui en temps de crise.
Bhumibol, qui a fêté en juin devant un million de personnes et une vingtaine de têtes couronnées le 60e anniversaire de son accession au trône, est le plus ancien monarque en exercice dans le monde.
Connu aussi sous le nom de Rama IX, il a eu le règne le plus long de l’histoire de son pays. Il a vu défiler 21 Premiers ministres et 16 Constitutions, se produire 18 coups d’État et son royaume de 65 millions de sujets se transformer d’un État agraire semi-féodal en un «tigre» économique de l’Asie.
Fin stratège politique, Bhumibol est un sage qui exerce surtout une autorité morale, la monarchie absolue ayant été abolie en 1932.
On lui a prêté des relations parfois difficiles avec le premier ministre renversé Thaksin Shinawatra, homme d’affaires de 57 ans arrivé au pouvoir en 2001.
En avril, le roi était sorti de sa réserve pour qualifier de «non démocratiques» des élections législatives anticipées, convoquées à la hâte par un Thaksin en difficulté. Le scrutin, boycotté par l’opposition, avait été finalement annulé.
Le général Sonthi Boonyaratglin, qui apparaît comme le chef du putsch de mardi soir, a rencontré le souverain juste après l’entrée en action de ses forces dans les rues de Bangkok. Par ailleurs, les chaînes de télévision passées sous le contrôle de l’armée n’ont cessé de diffuser des images de Bhumibol dans le but évident de rassurer la population.
Le roi a toujours cherché à se tenir au-dessus de la vie politique -souvent agitée- de ce pays d’Asie du Sud-Est mais son intervention a été apaisante pendant les crises nationales.
Lors d’un soulèvement populaire en mai 1992, il avait arbitré de manière spectaculaire en adjurant militaires et manifestants de mettre fin aux violences. Lors d’une allocution télévisée dont les images avaient fait le tour du monde, le roi avait exhorté les chefs des deux camps, accroupis à ses pieds en signe d’allégeance, à faire la paix. Le premier ministre de l’époque, issu d’un coup d’État militaire, avait démissionné et les troubles avaient cessé.
Durant la crise économique de 1997, il avait su redonner confiance aux Thaïlandais en prônant un retour aux valeurs traditionnelles telles le travail et l’autosuffisance.
Le portrait du roi est partout en Thaïlande, même dans les hameaux les plus reculés. Le 5 décembre, jour de son anniversaire, est férié.
La plupart des clichés du souverain le montrent en grand uniforme, le regard souvent figé derrière de grandes lunettes carrées, ou souriant, à la rencontre du peuple, visitant tel ou tel projet de développement rural, une carte d’état-major à la main et un éternel appareil photo en bandoulière.
Passionné des choses de la terre -Bhumibol signifie «force de la terre»-, le roi est aussi féru de sciences. Compositeur de musique reconnu, il est également saxophoniste de jazz.
Né le 5 décembre 1927 aux États-Unis, à Cambridge (Massachusetts), où son père poursuivait des études de médecine à Harvard, Bhumibol a été appelé à régner dès l’âge de 18 ans, en 1946, après la mort de son frère, le roi Ananda Mahidol.
Après un passage en Suisse où il complète ses études, il est couronné le 5 mai 1950, sous le nom de Rama IX.
Le souverain, qui a subi en juillet une intervention chirurgicale au niveau de la colonne vertébrale, est protégé du crime de «lèse-majesté» par des lois extrêmement sévères qui couvrent tout manquement de respect à la monarchie.
Le roi a eu quatre enfants de la reine Sirikit, épousée en 1950 à l’âge de 17 ans: trois filles et un garçon.