Les signes de reprise se multiplient en Thaïlande, avec notamment deux trimestres consécutifs de croissance et une nette amélioration du secteur industriel. Mais cette reprise peut-elle être durable en l’absence de reformes structurelles, et de changement important dans un modèle de croissance qui a montré ses limites ?  Trop dépendantes des exportations, la croissance thaïlandaise risque de se retrouver à nouveau fragilisée si l’impact des plans de relance venait à faiblir au delà de l’année prochaine.

Selon le Fonds monétaire international (FMI), la reprise en Asie a commencé en février de cette année, six mois avant la reprise américaine. La Banque de Thaïlande a également indiqué que l’économie thaïlandaise avait touché le fond au deuxième trimestre. Mais cette croissance est-elle une véritable reprise, ou une simple flambée due aux programmes de relance de la consommation ? La plupart des réponses politiques à la crise ont été des mesures de court terme pour soutenir l’économie sous forme d’injections budgétaires pour soutenir une plus grande consommation domestique. Mais assez peu d’attention a été accordée à la nécessité de faire des reformes durables,ou à la recherche d’un nouveau «chemin de croissance rééquilibrée» .

Les responsables politiques semblent espérer que la crise actuelle sera de courte durée et que les injections budgétaires peuvent apporter un soulagement temporaire avant que tout retourne à la normale. Mais même dans l’hypothèse d’ une amélioration significative de l’économie mondiale, il est peu probable que les exportations jouent un rôle aussi important dans les économies de l’Asie du Sud-Est, comme c’était le cas avant la crise. Une restructuration fondamentale de l’économie thaïlandaise, ainsi que celle des autres pays d’Asie, et un nouveau schéma de croissance moins dépendant des exportations sera nécessaire. Ce ne sera certainement pas facile et ne pourra être atteint à court terme.

La Thaïlande peut-elle retrouver une croissance durable au delà des relances budgétaires ?

En Thaïlande notamment, des facteurs structurels sont en cause, qui limitent la possibilité d’une reprise s’appuyant d’avantage sur le marché intérieur. L’absence d’un véritable système de sécurité sociale et d’importantes disparités de revenu sont autant de facteur qui risquent de retarder la marche vers un modèle moins dépendant des exportations.

Selon le Thailand Development Research Institute (TDRI), seules des réformes économiques et sociales importantes permettront de résoudre les conflits chroniques politiques en cours. Le président du TDRI Kosit Panpiemras mis en évidence trois questions fondamentales dans un séminaire annuel intitulé « Réformes économiques pour la justice sociale » :  la pauvreté, les monopoles, la corruption politique et l’écart de revenu.

« Ces facteurs favorisent l’apparition récurrente d’une  « politique populiste » qui permet d’emporter l’appui d’une majorité de la population qui se sent négligée, et de garantir un succès politique a leur promoteur. Toutefois, ces politiques ont tendance à ignorer la discipline monétaire et budgétaire, et la viabilité a long terme.  »

En d’autres termes, il ne suffira de singer les politiques de Thaksin pour obtenir un retour vers une croissance saine et moins dépendante des exportations : des réformes plus importantes sont nécessaires, touchant aux problèmes récurrent qui handicapent le royaume, comme la corruption et la concentration des revenus de la croissance sur une partie limitée de la population.

Olivier Languepin