Joli coup pour les militaires thaïlandais : 35 tonnes de « matériel de forage pétrolier » en provenance de Corée du Nord (bien connue pour ses entreprise d’exploitations pétrolifères), et apparemment à destination de Téhéran. Simple coïncidence, l’Iran vient justement de réaliser ses premiers tests concluants de missiles à longue portée.
Joli coup médiatique pour la Thaïlande qui a reçu les félicitation du secrétaire d’État américain (voir Hillary Clinton félicite la Thaïlande ), mais aussi coup de pot : qu’est ce qui a bien pu pousser le pilote ukrainien à venir se poser à Bangkok pour faire le plein, alors que juste à coté se trouvait la Birmanie, ou le Cambodge, nettement moins regardant en ce qui concerne l’application des sanctions internationales ? A moins que l’avion cargo suspect ait été obligé de se poser sur l’aéroport de Bangkok par une escorte militaire, mais dans ce cas, le secret est pour l’instant bien gardé.
Le caractère illégal de ce transport se fonde sur une violation de la résolution 1874 du Conseil de sécurité de l’ONU , qui a décidé, le 12 juin dernier, un embargo sur les armes en provenance de Corée du Nord à la suite de l’essai nucléaire nord-coréen du 25 mai. Selon les Thaïlandais, l’avion se rendait au Sri Lanka, mais sa destination finale était vraisemblablement l’Iran selon les pièces de missiles retrouvées dans la cargaison.
Devant le tribunal, les cinq hommes de l’équipage ont prétendu qu’ils pensaient transporter du « matériel de forage pétrolier » . À bord de l’avion cargo, les Thaïlandais ont découvert 35 tonnes d’armes, dont « des roquettes antichars RPG, des missiles et d’autres armes de guerre », et des pièces de missiles iraniens.
L’appareil était immatriculé au nom d’une ancienne compagnie aérienne géorgienne, Air West, d’après l’avocat des membres d’équipage arrêtés, Somsak Saithong. L’équipage, composé de quatre Kazakhs et d’un Biélorusse, a affirmé ne pas savoir qu’il transportait de l’armement.
Auparavant, l’avion cargo de fabrication russe Ilyushin II-76 saisi à Bangkok a été enregistré an nom d’une compagnie nommée Beibars liée au trafiquant d’armes serbe Tonislav Damnjanovic et, avant cela encore, au nom de trois entreprises recensées par le Département du Trésor des États-Unis comme des entreprises contrôlées par Viktor Bout, a déclaré M. Griffiths, qui dirige un projet de surveillance du fret aérien impliqué dans le trafic d’armes.
Viktor Bout est actuellement détenu à Bangkok, dans l’attente d’une décision sur une demande d’extradition en provenance des Etats Unis (voir Viktor Bout reste en Thaïlande). L’affaire Viktor Bout avait commencé de manière spectaculaire le 6 mars 2008, avec son arrestation dans un hôtel, en plein coeur Bangkok après avoir été piégé par des agents américains. Ils se faisaient passer pour des responsables de la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) cherchant à acheter des armes.
La biographie de Bout reste en grande partie à écrire : quarante-deux ans, né au Tadjikistan et parlant plusieurs langues, il aurait appris l’anglais, le français, mais aussi le persan et le zoulou. Il aurait vécu aux Émirats arabes unis, puis en Afrique du Sud. Viktor Bout est-il vraiment un trafiquant ou un simple intermédiaire au service de puissants personnages en Russie et en Ukraine ?
Ancien officier de l’armée de l’air soviétique, Viktor Bout est accusé d’avoir vendu des armes aux quatre coins de la planète, y compris pour des pays placés sous embargo a sur la vente d’armes par l’ONU, comme l’Angola, Sierra Leone, République démocratique du Congo… Bout, dont la vie a inspiré un livre – “Le marchand de mort” – et un film – “Lord of War” – aurait réalisé ces trafics grâce à plusieurs compagnies aériennes, dont Air Cess, basée à Sharjah, aux Émirats arabes unis. Faisant l’objet d’un mandat d’arrêt international, il se réfugie en 2001 à Moscou, où il échappe aux tentatives d’arrestation grâce à ses cinq passeports, et ses différentes identités. À partir de 2002 et d’une plainte de la Belgique pour le blanchiment de 325 millions de dollars, Interpol recherche Viktor Bout, mais ce n’est qu’en avril 2005, que le Trésor américain gèle ses comptes aux Etats Unis.