Cela fait maintenant plus de quatre mois que les manifestations contre le « système Thaksin » divisent la Thaïlande politiquement et socialement. Même si le PDRC a récemment décidé de mettre fin à l’opération « Bangkok shutdown », aucune solution ne semble être en vue pour mettre fin à la crise politique en cours.
A Bangkok, où se déroulent le gros des protestations on assiste progressivement la montée d’une vague de violences alors que le spectre des manifestations de 2010 hante toujours les esprits.
Retour sur les grandes dates de cette crise politique.
Une amnistie controversée
31 octobre- 1er novembre – Le projet de loi sur l’amnistie provoque l’indignation
Proposé par le Pheu Thai, le parti au pouvoir, dès août 2013, ce projet de loi prévoyait l’amnistie de tous les dirigeants politiques depuis 2006, y compris de l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra en exil à Dubaï depuis 2008. Condamné à deux ans d’emprisonnement pour corruption, ce dernier a préféré fuir le pays.
Perçu par une majorité de Thaïlandais comme une manœuvre pour permettre à Thaksin de revenir au pouvoir, ce projet de loi est l’élément déclencheur des mobilisations.
Le 1er novembre, au vu de l’indignation provoqué par le projet de loi, le gouvernement se rétracte. La loi sera finalement rejetée par le sénat le 11 novembre.
24 novembre – Les mobilisations s’intensifient
A Bangkok, le mouvement de protestation dirigé par Suthep Thaugsuban prend de l’ampleur. Le dimanche 24 novembre c’est plus de 180 000 personnes qui descendent dans les rues de la capitale. Le 25 les manifestants s’emparent de plusieurs bâtiments gouvernementaux dont les ministères des finances, des affaires étrangères et des relations publiques.
26 novembre : Suthep Thaugsuban dévoile son « projet pour la Thaïlande : Reformer avant d’élire »
Le leader du PDRC, principal mouvement d’opposition, demande la démission du gouvernement et la mise en place d’un conseil du peuple non élu le temps de reconstruire l’univers politique du pays et de faire « disparaître la corruption ».
30 novembre : Premières violences depuis le début de la crise
Le 30 novembre les premières scènes de violences se déroulent sur deux fronts : entre manifestants anti et pro-gouvernementaux d’une part et entre forces de l’ordre et anti-gouvernementaux d’autre part. Les violences font 5 morts dans la journée.
Les premiers jours de décembre sont également marqués par une hausse progressive des actes de violences et par une tentative des manifestants de s’emparer de Government House, siège de la première ministre. Le 2 décembre 119 blessés sont à signaler.
3 décembre : Les forces de l’ordre rebroussent chemin
Après une multiplication des violences, la police se retire de Government House, les manifestants s’emparent des lieux et fêtent leur victoire partielle.
Le 5 décembre, date de l’anniversaire du roi, ce dernier intervient pour un appel au calme tandis qu’une trêve symbolique a lieu.
Dissolution du Parlement
8 décembre : La première ministre dissout le parlement
Yingluck Shinawatra, actuelle première ministre annonce une dissolution du parlement et l’organisation de nouvelles élections prévues pour février 2014.
Le 21 décembre Suthep Thaugsuban, annonce un boycott des élections.
Opération Bangkok Shutdown
13 janvier : Lancement de l’opération Shutdown Bangkok
Après l’annonce, le 27 décembre, d’une opération de paralysie de Bangkok, celle-ci débute le lundi 13 janvier. Au total ce sont 7 points de blocus qui sont mis en place dans de grands axes de la capitale dont Asoke, Chitlom ou encore MBK.
Cependant cette opération n’est pas un franc succès, principalement en terme de mobilisation.
Si l’activité économique et le fonctionnement du gouvernement est ralenti, la vie continue dans la capitale où les habitants sont habitués à de tels mouvements sociaux. On ne peut pas vraiment parler de paralysie générale de la ville.
21 janvier : Mise en place de l’état d’urgence à Bangkok et dans les provinces environnantes
Suite à une attaque à la grenade ayant fait un mort et plusieurs blessés le 17 janvier, le gouvernement annonce la mise en place de l’état d’urgence pour une durée de 60 jours dans la capitale.
26 janvier : Des élections anticipées mises à mal par le meurtre d’un leader de l’opposition
Alors que ce déroule les élections anticipées dans un climat lourd de tentions, Suthin Tharathin un des leader de l’opposition est abattu lord d’un discours à Wat Sri.
1 février : Bataille de rue à Laksi un quartier du nord de Bangkok
En fin d’après-midi une fusillade éclate dans le nord de la capitale. Deux journalistes sont blessés dans les affrontements qui ont duré environ une demi-heure : le photographe américain James Nachtwey et le journaliste thaïlandais Jirawab Soukaran.
Les élections perturbées
Un manifestant anti gouvernemental se repose à Bangkok à proximité d’un barrage. Photo : Wilfried Devillers2 février : Des élections législatives partielles
Suite aux événements de la veille, la tension est palpable le jour des élections législatives. De nombreux bureaux de votes sont bloqués par les manifestants qui empêchent l’acheminement des bulletins. D’autres sont tout simplement fermés.
Dans 9 provinces du pays, les élections sont annulées.
Selon la commission électorale on compte 47,72% de participation sachant qu’aucun représentants du parti démocrate ne s’est présenté comme candidat.
Suite aux élections, le mouvement de Suthep ne relâche pas la pression sur gouvernement et réclame une invalidation de ces dernières.
Les forces de l’ordre passent à l’offensive
De son côté le gouvernement a entamé mi-février plusieurs actions coup de poing pour déloger les manifestants de certains points de blocus : le 16 février les forces de police ont ainsi récupéré Government House, repris le lendemain par les manifestants.
Le 18 février c’est plus de 15 000 policiers qui se déploient dans les rues de Bangkok pour s’emparer des points de rassemblements, un déploiement qui aboutit à la mort de quatre personnes dont un policier.
Attentat à la grenade dans le centre de Bangkok
Le week-end dernier s’est également terminé dans le sang suite a deux attaques à la grenade dans le centre de Bangkok le samedi 22 février et le dimanche 23 faisant 4 nouvelles victimes dont trois enfants.
Après trois mois de protestations le bilan humain est lourd : 17 morts et des centaines de blessés. Si pro et anti-gouvernement tentent de rejoindre le chemin des négociations, une éventuelle sortie de crise reste encore très hypothétique.