Pendant toute la journée de dimanche, toutes les chaines de télévision thaïlandaises ont diffusé les mêmes images en direct: celles de l’immense et impressionnant cortège officiel portant les cendres de la défunte sœur du roi dans les rues de Bangkok. Pour l’occasion les rues du quartier de Sanam Luang avaient été interdites à la circulation depuis trois jours. Le roi Bhumibol avait procédé la veille à la cérémonie de crémation de la princesse Galyani, décédée en janvier.
Des centaines de milliers de Thaïlandais ont fait le déplacement aux alentours du Grand Palais, au cœur de Bangkok, pour suivre de loin la cérémonie officielle ponctuée de salves d’artillerie. Après avoir effectué des études en Suisse (tout comme son frère), la princesse Galyani avait été professeur de littérature française dans plusieurs universités de Thaïlande.
Mais au delà du faste de ces grandioses funérailles, les questions abondent sur l’avenir de la Thaïlande et le rôle de la monarchie. L’actuel souverain, qui aura 82 ans le 5 décembre prochain, est à peine plus jeune que sa sœur ainée. Il a été hospitalisé au moins deux fois cette année pour des problèmes de santé, et de nombreux observateurs estiment que la situation politique en la Thaïlande pourrait être gravement perturbée par sa disparition. Son prestige et son autorité morale constituent sans doute les derniers remparts qui empêchent l’actuel conflit politique qui mine le pays, de dégénérer en affrontement violent.
Les manifestants de la PAD (l’Alliance du peuple pour la démocratie) qui exigent la démission du gouvernement démocratiquement élu, n’ont officiellement aucun soutien de la monarchie, mais la reine a assisté aux obsèques de l’un d’entre eux (une jeune fille de 26 ans) décédée au cours de violents affrontements avec la police. Après trois années de crise politique, deux constitutions, trois élections, et deux premiers ministres et une crise financière dont les effets commencent à se faire sentir, la Thailande est à bout de souffle. Et cette fois il est peu probable que les militaires s’en mêlent: leur gestion calamiteuse des affaires économiques pendants les 15 mois de pouvoir militaire qui ont suivi le coup d’Etat de septembre 2006, semble avoir eu raison de leurs ambitions politiques.
Le roi de Thaïlande Bhumibol Adulyadej a sans doute tiré la même conclusion de la même expérience, et a cette fois adopté un mutisme complet depuis le début de la crise politique. Immensément révéré par ses sujets qui se tournent souvent vers lui en temps de crise, il a eu le règne le plus long de l’histoire de son pays. Il a vu défiler 21 Premiers ministres et 17 Constitutions, se produire 18 coups d’État et son royaume de 65 millions de sujets se transformer d’un État agraire semi-féodal en une puissance régionale de l’Asie du Sud est. Situation paradoxale puisque les deux camps en présence n’hésitent pas a se réclamer du roi pour asseoir leurs revendications, et a proclamer haut et fort leur soutien a la monarchie, même si un des membres du PPP, Mr Jakaprob avait été obligé de démissionner du gouvernement suite a une accusation de lèse majesté.
Le bras de fer entre des protestataires dont le programme est tout sauf démocratique, et un gouvernement démocratiquement élu mais manipulé par un ex-premier ministre en exil n’aboutit à rien, sinon à dégrader un peu plus la situation économique en effrayant les investisseurs et les touristes. Quelle crédibilité peut encore avoir un gouvernement qui campe dans un ancien aéroport et qui n’ose plus organiser un sommet diplomatique dans sa capitale ?
Par crainte des troubles possibles dans Bangkok, le gouvernement s’est résigné à tenir le prochain sommet de l’ASEAN en décembre dans la ville de Chiang Mai, à plus de 800 km de la capitale dans le nord de la Thailande. Une décision plutôt humiliante à prendre pour un gouvernement qui a du déménager dans l’ancien aéroport désaffecté de Don Muang, car ses bureaux sont occupés par les manifestants de la PAD depuis plus de deux mois.
Après avoir connu le règne autoritaire de Thaksin Shinawatra, utilisant le pouvoir pour s’enrichir dans des proportions encore inédites (deux milliards de dollars de sa fortune sont toujours bloqués en Thaïlande), la Thailande doit maintenant subir la tyrannie d’un mouvement minoritaire, sans autre légitimité apparente que quelques milliers de manifestants de la PAD qui campent dans les bureaux du premier ministre.
2 comments
Article qui résume bien la situation actuelle en Thailande mais voulant aborder tous les thèmes et tous les protagonistes l’article s’y perd un peu de précision voir à limite inexacte car il induit des suppositions qui ne sont pas encore totalement vérifié.
A vous lire on croirait que le gouvernement thailandais est lâche et cherche à fuir les problèmes ce qui est loin de la réalité.
Vous affirmez que Thaksin autoritaire et « utilisant le pouvoir pour s’enrichir dans des proportions encore inédite » puis vous citez sa fortune de deux milliards de dollars. A cette affirmation je vous répond d’une part que le procès est en cours actuellement et aucune décision sur le sujet n’a été encore rendu ni dans un sens ni dans un autre, mais vous vous tirez déjà une vérité.
D’autre part avant même de devenir Premier Ministre la fortune de Thaksin était déjà colossale, certes elle a encore augmenté pendant son mandat, mais pour l’instant aucune décision de justice n’affirme ou n’infirme comme quoi sa fortune a augmenté du fait de sa position, ou de manière illégale contrairement à votre article qui laisse entendre que les deux milliards ont été obtenu en raison et pendant son mandat.
Il s’ensuit que pour l’esprit de beaucoup de personnes, voir même de journalistes que l’enrichissement de Thaksin se fait à l’encontre de la Thaïlande, voire même on l’accuse de piller la Thailande. Est-il un voleur, s’est-il enrichi sur le dos des thaïlandais… ? Voici son bilan économique (chiffres des organismes internationaux, publiés par Wikipédia) sachant qu’ il a gagné les élections en avril 2001 et renversé par les militaires en septembre 2006.
Voici son bilan à fin 2001 et à fin 2005 , pour l’endettement public en 2001 cela représente 57% du PIB et fin 2005 41% du PIB, concernant la richesse nationale autrement-dit le PIB à fin 2001 il était de 4.9 Trillion de BHAT et à fin 2005 7.1 trillion de BHAT. Pour la réserve en devise du pays à fin 2001, elle était de 30 billions USD et fin 2005 64 billions USD, pendant son mandat la Thailande a remboursé son emprunt au FMI , 2 ans avant le terme. A fin 2001, le pourcentage de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté était de 21% et à fin 2005 elle était de 13%. Etc … etc… voilà son bilan économique. A vous d’en juger.
Est-il un diable, un voleur, un corrompu, un dictateur, un profiteur comme beaucoup d’articles le décrit ? (et beaucoup de gens se demandent pourquoi les Thaïlandais l’adorent-ils autant, et si vous n’êtes pas convaincus j’espère que vous comprendrez au moins leur soutien .
Une petite correction a apporter, Monsieur Jakaprob est membre du PPP et non du PAD, une faute de frappe je suppose ….. « même si un des memebres du PAD, Mr Jakaprob »
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