Dans un pays où le piratage est très repandu, le marché  du jeu vidéo en Thaïlande est plutôt discret. Mais quelques entreprises, thaïlandaises et étrangères, arrivent à tirer leur épingle du jeu.

Les chiffres de l’industrie du jeu vidéo et du logiciel en Thaïlande sont difficiles à avoir tant tout ce qui touche à ce domaine est victime du piratage. Un coup d’oeil au Pantip Plaza à Bangkok, marché spécialisé dans la vente d’ordinateurs, logiciels, consoles de jeu et autres articles informatiques, confirme cette impression : les étals de jeux et de logiciels pirates foisonnent, ainsi que des vendeurs qui proposent aux clients de modifier leur console de jeu afin qu’elle puisse lire les jeux contrefaits.

Malgré un contexte de vente difficile, certaines entreprises ont réussi à se faire une place sur le marché du logiciel thaïlandais. Fraichement débarqué en Thaïlande avec le projet d’ouvrir sa propre boite de jeux, Yan Marchal a apprécié les différentes aides du gouvernement:

« Le B.O.I. (Thailand Board of Investment) offre de nombreux avantages comme le droit d’être actionnaire à 100%, des facilités pour obtenir des visas et des permis de travail pour les collaborateurs étrangers ainsi que des exemptions d’impôt sur les bénéfices pour un certain nombre d’années ».

Un marché dominé par le piratage

La plupart des consoles de jeux ne sont pas officiellement distribuées en Thailande. Elles sont souvent proposées avec une carte mémoire qui permet de lire les jeux contrefaits ou téléchargé sur Internet

« Il n’y pas de marché de l’édition de jeux pour consoles en Thaïlande car les gens piratent et les consoles ne sont pas officiellement distribuées ici pour la plupart d’entre elles. Il y a très peu d’édition de jeux PC pour la même raison », explique Yan Marchal, directeur de Sanuk Software.

« Le vrai marché ici, c’est le jeu en ligne, comme en Corée du Sud et en Chine, des jeux qui ne sont pas vendus sur le commerce mais dont l’acquisition et l’inscription se font en ligne »

Parmi les leaders sur le marche thaïlandais, on peut y trouver NC True (fusion entre le géant Coréen NC et True), Asia Soft ou True Digital Entertainent qui opèrent des jeux en ligne, la plupart de ces jeux étant Coréens ou Chinois ensuite adaptés au marche du Royaume. Des succès planétaires comme Lineage II ou Guildwars semblent avoir trouvé leur public en Thaïlande

Il y a très peu d’édition de jeux PC en Thaïlande à cause du piratage. Le vrai marché c’est le jeu en ligne comme en Corée et en Chine
-Yan Marchal, directeur de Sanuk Software.

De plus en plus de petites entreprises voient le jour, la plupart avec la licence Sony ou Nintendo, pour développer des jeux faciles à concevoir et peu coûteux. Le marché Apple, avec l’iPhone et l’iPad, est devenu une cible pour plusieurs entreprises thaïlandaises, qui peuvent produire beaucoup d’applications à des coûts modiques, le tout disponible en téléchargement avec un moindre risque de piratage.

Quelques entreprises étrangères développent également en Thaïlande comme Sanuk Software, dirigée pas le Français Yan Marchal, qui depuis 2003, travaille sur les consoles Nintendo et Sony, avec plus de 25 jeux développés sur DS et Wii.

« En Thaïlande, on a un rapport entre les compétences disponibles et les coûts qui est bon, pour certains types de produits. De plus, sur le plan humain, les gens sont relativement faciles à travailler avec »,

explique-t-il.

Sanuk Software emploie une vingtaine de personnes dans des locaux situés à une vingtaine de kilomètres de Bangkok. L’entreprise s’est récemment mise à éditer ses propres jeux pour faire face à une demande minime de softs sur les consoles de Nintendo.

L’attention du gouvernement

Dans le domaine du logiciel en particulier, la SIPA (Software Industry Promotion Agency), sous la tutelle du Ministère de la Science et de la Technologie, a pour mission de promouvoir et développer le marché du logiciel en Thaïlande:

« Depuis plusieurs années, la SIPA finance la participation d’entreprises thaïlandaises à des salons internationaux dans l’industrie du logiciel et en particulier dans le jeu vidéo. Ils ont régulièrement financés la participation à la Game Connection à Lyon et à San Francisco »,

ajoute Yan Marchal.

« Mais ils ont récemment exclus les entreprises avec un capital étranger », deplore-t-il.

Même si le gouvernement thailandais cherche à promouvoir l’industrie du jeu video, il a pris plusieurs mesures afin de protéger sa population, comme l'interdiction du jeu Grand Theft Auto IV, juge trop violent.

En Août 2008, un jeune homme de 19 ans assassine un chauffeur de taxi. Une fois arrêté, le meurtrier avouera avoir joué au jeu Grand Theft Auto IV, qui vous met dans la peau d’un gangster. Il voulait savoir si « c’était aussi facile de cambrioler un taxi dans la vraie vie ». Ce fait divers a défrayé la chronique et a incité le gouvernement à bannir une dizaine de jeux dits violents du commerce en Thaïlande, même si des copies pirates pouvaient être trouvées.

Le cas de l’addiction aux jeux en ligne inquiète aussi le Royaume. Le nombre de jeunes jouant à des jeux en ligne dans les cybercafés est de plus en plus important. L’année dernière, le gouvernement a déclaré un couvre feu concernant les jeunes joueurs. Les personnes âgées de moins de 15 ans ne sont plus autorisées dans les cybercafés après 20h, alors que la limite de temps pour les 15-18 ans s’étend jusqu’à 22h.

La Thaïlande n’est pas le seul pays touché par ce phénomène, la Chine a récemment ouvert des camps spécialisés qui remettent les joueurs dans le « droit chemin ».

Melaine Brou