En face de la prison de Chiang Mai, un salon de massage pas comme les autres, ici, les masseuses sont aussi prisonnières.
Ces femmes suivent un programme de réinsertion : 180 heures de formation aux massages traditionnels thaïs.
A l’issue de ce programme, elles sont certifiées masseuses professionnelles. Cela leur permet de travailler au salon durant les six derniers mois de leur peine, facilitant leur réinsertion à leur sortie de prison
Ce centre de massage a été lancé il y a 10 ans par celle que l’on surnomme Jinny. Cette ancienne gardienne de prison de la maison correctionnelle de Chiang Mai souhaite aider les femmes à retrouver un travail.
Armées pour affronter la liberté
« Les femmes me disent qu’il est très difficile de trouver un travail après la prison. Elles sont stigmatisées. Les gens ne veulent pas embaucher des anciennes prisonnières; ils n’ont pas confiance en elles et ont peur d’elles », confie Jinny.
Après seulement trois mois d’existence, le centre a ouvert une succursale dans la vieille ville de Chiang Mai. 42 masseuses proposent notamment des massages traditionnels, des massages des pieds ou encore des soins du visage.
Une fois relaxés, les clients peuvent manger au restaurant ou boire un café, acheter des pâtisseries et des objets, tous confectionnés par les prisonnières.
Les touristes se pressent au salon chaque jour, il est préférable d’effectuer une réservation avant de s’y rendre. « Ça vaut le coup d’attendre ! » lance un client satisfait.
A leur sortie, les salaires des masseuses leur sont restitués. Diplômées, elles peuvent tenter de se faire embaucher dans un salon traditionnel ou au Lila Thaï Massage.
Fondé par l’ancienne directrice de la prison de Chiang Mai en 2012, Naowarat Thanasrisudarat, ce salon propose les mêmes services par d’anciennes condamnées.
Avant la création du centre, elle a ouvert un parloir de massage à la prison et a donné aux femmes une formation pendant leur détention.
Stigmatisées et discriminées à l’embauche
La directrice du salon se bat contre l’ « Healthcare Business Place Act ». Cette loi interdit toute personne à devenir masseur ou masseuse moins d’un an après leur sortie de prison.
Naowarat Thanasrisudarat explique que la police pense cette loi nécessaire afin de « prévenir les risques pour les usagers d’être agressé ou de se faire voler leur bien pendant qu’ils profitent des services ».
Selon elle, c’est un non-sens
« quand elles n’ont pas les moyens de vivre, elles vont peut-être recommencer à vendre de la drogue. Un an, c’est long. Comment peuvent-elles se nourrir ainsi que leur famille pendant cette période? »
La détention ou le recel de drogue est en effet la cause principale de leur détention. Chiang Mai se situe dans le triangle d’or, au cœur du trafic de méthamphétamine.
Un taux d’emprisonnement record
Le pays détient la plus grande proportion féminine au sein de la population carcérale au monde ( 13,6% des personnes détenues en Thaïlande sont des femmes), avec un nombre total de détenus évalué à 289.675, un chiffre très élevé par rapport à la population totale de la Thaïlande estimée à 68,2 millions d’habitants.
A titre de comparaison en France la population carcérale est de 68.514 détenus avec seulement 3,3% de femmes, pour une population totale de 67,5 millions d’habitants.
Ainsi, depuis 2006, la princesse Bajrakityabha Mahidol (la fille aînée du roi Maha Vajralongkorn) soutient les femmes emprisonnées en lançant une initiative visant à améliorer les conditions de vie des détenues et à les aider à réintégrer la société.
Le programme élaboré à la prison de Chiang Mai est le fruit de cet engagement.
Si vous souhaitez vous aussi soutenir les femmes de la prison de Chiang Mai et les anciennes détenues, le massage traditionnel ne vous coûtera que 200 THB pour une heure. Les centres situés dans la vieille ville sont ouverts de 8h à 16h30 et de 9h à 21h.
Pour plus d’informations sur le salon Lila thaï massage : http://www.chiangmaithaimassage.com/index.php?name=aboutus