Hashtag contre Kalash : si la réponse de la Communauté internationale au terrorisme islamique se limite à des tags sur Twitter, il n’y a guère de raison pour les islamistes de mettre un terme à leur offensive.
Sans rien retirer à la douleur et l’indignation qui a suivi le massacre de l’équipe de Charlie Hebdo, on ne peut que rester dubitatif sur l’ampleur de la mobilisation, notamment médiatique et sur les réseaux sociaux, qu’a déclenché l’attentat du 7 janvier à Paris.
Certes aujourd’hui “nous sommes tous Charlie hebdo”, et à juste titre, mais hier qu’étions nous ? “Tous Peshawar” sans doute mais sans le savoir comme M. Jourdain.
Le 16 décembre, sept hommes lourdement armés appartenant au groupe islamiste des talibans pakistanais sont entrés dans une école de Peshawar, et ont exécuté méthodiquement 132 élèves de l’école en leur tirant dans la tête ou la poitrine avec des armes automatiques. Un modus operandi quasiment identique à celui utilisé à Paris dans le 11e arrondissement.
Mais Peshawar est à environ 8000 kilomètres de Paris, et environ et 11.000 kilomètres de New York.
La loi de la mort kilométrique
L’événement est passé quasiment inaperçu sur les réseaux sociaux : même pas un hashtag sur twitter, c’est dire si la fameuse “loi de la mort kilométrique” (1) a pleinement fonctionné.
Que dire du kamikaze d’Al-Qaïda qui presque à la même heure que l’attentat de Charlie Hebdo à Paris, mais à Sana au Yémen, a tué 37 personnes. Il est passé complètement à la trappe.
On peut faire la même observation sur le conflit qui déchire la Thaïlande dans les provinces du sud à majorité musulmane : entre 300 et 400 morts par an dans des attentats terroristes, plus de 6000 victimes en dix ans, et pourtant totalement absent du radar médiatique.
Les “incidents” impliquent très rarement des touristes et se déroulent toujours dans des villes éloignées des itinéraires touristiques, les attentats ne sont jamais revendiqués et les auteurs rarement identifiés.
Quand ils le sont, leur revendications sont floues, et ils ne sont pas toujours liés au mouvement indépendantiste musulman qui conteste le rattachement à la Thaïlande. Pourtant le conflit du sud thaïlandais est en nombre de victimes, le conflit le plus meurtrier des dix dernières années après l’Irak, l’Afghanistan et la Syrie.
Fatigue de l’indignation et mémoire courte
Après chaque acte terroriste majeur qui attire l’attention des médias , une période plus ou moins longue de mobilisation et d’indignation a lieu : mais il y en a quasiment tous les jours, alors c’est dur de rester indigné tout le temps pour tout le monde, même pour les Pakistanais, les Yéménites et les habitants de Yala.
Le massacre de Peshawar en décembre n’a pas fait exception, même si il est peut être un peu plus difficile d’effacer de sa mémoire l’image de sept hommes adultes marchant d’une classe à une autre, en exécutant consciencieusement 132 garçons et filles dans leurs uniformes et blouses scolaires.
Que dire du groupe djihadiste islamique nigérian Boko Haram ? Après près avoir enlevé quelques 276 filles d’une école rurale, il vient d’utiliser une fillette de 10 ans comme bombe humaine dans un marché.
Hashtag contre Kalash ?
Des 276 filles enlevées et vendues comme esclaves, on est toujours sans nouvelles, et tout ce qui reste de la mobilisation c’est probablement la photo de la Première Dame Michelle Obama faisant la promotion d’un hashtag….
Si la réponse de la communauté internationale à ce qu’il faut ben appeler une guerre mondiale coordonnée, se limite à des tags sur Twitter, il n’y a pas de raison pour les islamistes de mettre un terme à leur offensive.
Certes la mobilisation médiatique est importante, mais si elle est proportionnelle à notre impuissance à lutter contre les extrémistes qui décapitent, assassinent et massacrent de manière quotidienne, elle risque de montrer rapidement ses limites.
(1) La place occupée par un mort dans les médias est inversement proportionnelle à la distance qui sépare le lecteur du lieu où s’est produit la mort.