En ce moment la Thaïlande a plutôt le regard tourné vers l’Est, et plus particulièrement vers la Chine : Li Keqiang, le Premier ministre chinois est le dirigeant étranger de plus haut rang à avoir visité le royaume depuis que l’armée a pris le pouvoir le 22 mai.
C’est une des conséquences du coup d’Etat du mois de mai 2014 : contrairement à l’Europe et aux Etats-Unis, la Chine s’est prudemment abstenu de tout commentaire négatifs lorsque l’armée a pris le pouvoir à Bangkok.
Le premier ministre chinois Li Keqiang est, de manière assez symbolique, le dirigeant étranger le plus important à visiter le pays depuis que l’armée a pris le pouvoir le 22 mai.
L’importance accordée à cette visite démontre que la junte au pouvoir en Thaïlande est en train de renforcer les liens commerciaux et diplomatiques avec la Chine, comme le souligne les accords passés la semaine dernière à l’issue de la visite du Premier ministre chinois.
Pas de problèmes politiques
Le porte-parole du gouvernement thaïlandais Yongyuth Mayalarp n’a pas manqué de remarquer que la visite de Li Keqiang est
« Une bonne occasion pour la Thaïlande de montrer que nos problèmes politiques ne sont pas un obstacle au commerce », soulignant que
« la situation ici est normale, et nous travaillons vers une nouvelle démocratie thaïlandaise.”
Une réorientation dictée par des impératifs économiques ?
Bien que l’armée a réussi à stabiliser quelque peu l’économie depuis son arrivée au pouvoir, la croissance en Thaïlande donne encore des signes inquiétants de faiblesse : sans doute moins de 1% pour 2014, soit la performance la plus médiocre des pays de l’Asean.
La tendance pourrait se poursuivre en 2015 si la consommation intérieure et l’investissement privé continuent de stagner. Avec les Etats-Unis qui sont en train de couper l’aide militaire à la Thaïlande, et l’Europe qui a suspendu les négociations commerciales après le coup, le gouvernement a fait du renforcement des liens avec la Chine, déjà le plus grand partenaire commercial de la Thaïlande, une priorité absolue.
En 2013, la Chine a dépassé le Japon comme premier partenaire commercial de la Thaïlande, et elle représente environ 14% du commerce total du royaume cette année.
Un ambitieux programme ferroviaire
Le point culminant de la visite de Li a été a signature de deux mémorandums d’accord sur l’élaboration d’un projet ferroviaire clé et l’achat de produits agricoles.
Le projet de chemin de fer, dont le coût est estimé à environ 12 milliards de dollars, s’inscrit dans un plan plus large pour relier la ville de Kunming vers les pays voisins d’Asie du Sud.
La Chine prévoit de construire deux lignes de chemins de fer reliant la province du nord-est de Nong Khai et le port est de Map Ta Phut à Bangkok, à partir de 2016, selon les informations données par le gouvernement thaïlandais.
La liaison ferroviaire nord-sud, couvrant 870 kilomètres est prévue pour faciliter le transport de marchandises du sud de la Chine vers les ports du golfe de Thaïlande via le Laos.
Ecouler les stocks de riz
La Chine a également promis d’acheter environ 2 millions de tonnes de riz et quelques 200 000 tonnes de caoutchouc. Un achat qui devrait aider le gouvernement thaïlandais à écouler les stocks dont il a hérité des programmes de subventions de l’administration précédente.
La signature de ces accords est une nouvelle étape dans les relations entre la Chine et la Thaïlande, mais ils sont aussi susceptibles que les précedents d’être contrariés par des aléas politiques.
D’autres projets d’infrastructure – y compris ce projet de chemin de fer – ont été retardés ou suspendus en Thaïlande au cours des dernières années, en raison des tensions politiques.
Il en est de même pour l’achat de riz direct d’Etat à Etat qui est au centre d’un des nombreux scandales de corruption du précédent gouvernement. Au début de cette année, la Chine avait subitement renoncé à un accord pour acheter 1,2 millions de tonnes de riz thaïlandais quand une enquête de corruption a commencé sur le régime de subventions du riz du gouvernement de Yingluck Shinawatra.