La junte birmane n’aime pas beaucoup les journalistes: elle préfère le huis clos qui protège des regards indiscrets de la communauté internationale.
Les généraux ne veulent pas de témoins, et la presse n’est pas bienvenue en Birmanie pour rendre compte des conséquences du cyclone, et surtout de l’attitude du gouvernement.
Reporters sans frontières et la Burma Media Association dénoncent la poursuite des arrestations de journalistes birmans, dont certains pour avoir simplement porté secours aux victimes du cyclone Nargis.
Les deux organisations demandent leur libération et la délivrance de visas de presse aux journalistes étrangers.
« La communauté internationale, notamment les Nations unies, ont réussi à convaincre les autorités d’ouvrir le pays à l’aide humanitaire étrangère. Il est maintenant urgent d’obtenir de la junte qu’elle cesse d’empêcher la participation de la société civile et de la presse à cet effort. En empêchant les journalistes de travailler, la junte militaire tente de faire oublier sa gestion désastreuse de la crise. C’est en partie réussi puisque l’opinion publique internationale s’est désintéressée du sort des centaines de milliers de Birmans victimes du désastre, par manque d’images et d’informations nouvelles », ont dénoncé les deux organisations.
Aung Kyaw San, rédacteur en chef du magazine aujourd’hui suspendu Myanmar Tribune, a été arrêté le 15 juin 2008 avec seize autres personnes pour avoir enterré des cadavres de victimes du cyclone près de Bogale.
Selon des proches, cette équipe de volontaires aurait enterré plus de 400 corps en suivant les procédures de la Croix-Rouge internationale. Ils retournaient à Rangoon pour collecter de nouveaux sacs destinés à enterrer les corps quand ils ont été interpellés.
Cinq d’entre eux, dont Aung Kyaw San, sont toujours emprisonnés à Insein. Le journaliste Zaw Thet Htwe et le blogueur Zarganar sont également détenus pour être venus en aide aux victimes de Nargis. Zarganar a été arrêté après avoir donné une interview à un reporter de la chaîne britannique BBC (http://www.youtube.com/watch?v=-txhu7N8A58).Une journaliste birmane, Ma Ein Khine Oo, âgée de 23 ans, travaillant pour Ecovision Journal, a été arrêtée le 10 juin alors qu’elle couvrait une manifestation de personnes affectées par le cyclone devant les bâtiments d’une institution onusienne à Rangoon.
Elle serait toujours détenue au commissariat de police de Tamwe, dans l’attente d’un procès. Elle a été inculpée le 25 juin en vertu de l’article 505(b) qui punit de peines de prison les auteurs de « propos ayant conduit à des erreurs dans le public ».
Au moins dix journalistes et un blogueur sont actuellement emprisonnés en Birmanie. Trois d’entre eux le sont pour avoir porté secours aux victimes du cyclone.
Par ailleurs, une journaliste sud-coréenne, Lee Yu Kyong, a été expulsée le 22 juin après s’être rendue dans les locaux de la Ligue nationale pour la démocratie d’Aung San Suu Kyi. Selon son témoignage recueilli par le site Mizzima, des policiers se sont présentés à son hôtel pour lui demander de quitter le pays sur-le-champ. Les agents lui ont confisqué des CD contenant des photos des zones affectées par le cyclone. A l’aéroport, des officiels ont apposé un tampon « Expulsé » sur son passeport.
Une dizaine de journalistes étrangers ont été interdits d’entrée sur le territoire ou expulsés de Birmanie depuis le passage du cyclone Nargis. Les autorités refusent toujours d’accorder des visas de presse et des check points militaires ont été installés sur plusieurs routes permettant d’accéder à la zone du delta. Enfin, des Birmans ont été inquiétés par les autorités pour avoir aidé des journalistes étrangers à travailler dans le sud du pays.
source:
Vincent Brossel
Asia – Pacific Desk
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