Les enjeux de l’AEC pour la Thaïlande et les autres pays de l’Asean ne sont pas seulement économiques : ils sont aussi politiques, et la constitution d’un bloc homogène capable de négocier avec les grandes puissances commerciales que sont la Chine et les Etats-Unis est un enjeu important pour l’avenir.
C’est surtout le cas pour contrer les éventuelles ambitions de la Chine, dont les revendications territoriales en mer de Chine sur des portions de territoires disputées par le Vietnam et les Philippines, ont semé le doute sur les intentions des dirigeants chinois.
« Les principal problème en ce moment, c’est que la politique de la Chine vis à vis des pays de l’Asean manque de clarté »
estime Arnaud Leveau, chercheur en sciences politiques, Université Chulalongkorn.
« La Chine mène une politique de « dual track » c’est à dire qu’elle accepte de négocier certains sujets avec l’Asean en tant qu’entité constituée, mais pour d’autres problèmes (en général les plus importants) elle négocie également directement avec les pays membres de manière séparée. »
En fait la course est lancée entre les États-Unis et la Chine pour être le premier à être en mesure d’annoncer une zone de libre échange dans la région Asie Pacifique. La Chine espère utiliser sa position en tant que président de l’APEC cette année pour proposer une étude de faisabilité sur un accord de libre-échange de l’Asie-Pacifique (FTAAP), évoqué pour la première fois en 2006.
ASEAN, AEC, FTAAP, TPP, APEC : l’étourdissante valse des sigles.
Pas facile de s’y retrouver dans la quantité de sigles qui envahissent les articles consacrés au commerce et à la géo politique dans la région. De manière très schématique on peut dire :
1. AEC = les pays de l’ASEAN avec en plus une zone de libre échange, des accords sur multi latéraux sur la libre circulation des services et des capitaux.
2. FTAAP (Free Trade Agreement for the Asia-Pacific) : c’est le projet de zone de libre échange soutenu par la Chine dans la région à partir des pays membres de l’APEC.
La Thaïlande fait partie des pays de l’Apec, elle est donc potentiellement intéressée par le projet soutenu par la Chine
3. TPP (Trans-Pacific Partnership, ou Partenariat trans-Pacifique) : le projet concurrent d’union douanière soutenu par les Etats-Unis.
Depuis 2014 douze pays de la région Asie-Pacifique ont participé aux négociations sur le TPP: Australie , Brunéi Darussalam , Canada , Chili , Japon , Malaisie , Mexique , Nouvelle-Zélande , Pérou , Singapour , le Royaume-Unis , et le Vietnam. Les pays du Trans-Pacific Partnership ont annoncé que le TPP vise à «renforcer le commerce et l’investissement entre les pays partenaires du PPT, à promouvoir l’innovation, la croissance économique et le développement, et à soutenir la création et le maintien d’emplois.»
La Thaïlande au centre des projets concurrents
Potentiellement, la Thaïlande peut être partie à toutes les initiatives en cours. Elle est de fait impliquée par le projet AEC qui concerne tous les pays de l’Asean, mais elle n’a pas encore choisi de rallier le projet chinois ou le projet américain. Pour le moment la Thaïlande, contrairement à la Malaisie, Vietnam et Singapour, ne fait pas partie des pays associés au TPP, elle penche donc plutôt en faveur du projet chinois.
La mise en œuvre du TPP est l’un des principaux objectifs de la politique commerciale de l’administration Obama. Mais ce projet exclut la Chine et selon certaines estimations, la mise en place du TPP pourrait coûter environ 100 milliards de dollars à la Chine par an. Pékin tente donc à tout prix de neutraliser le plan américain, notamment en poussant son propre projet (FTAAP) mais aussi comme indiqué plus haut, en multipliant les négociations bi-latérales avec les pays de la zone.
La liste des pays ayant déjà un accord de FTA avec la Chine, et la liste de ceux qui sont en négociation est disponible sur un site officiel du gouvernement chinois qui est exclusivement consacré à ce sujet : http://fta.mofcom.gov.cn/english/index.shtml
Rien qu’au mois de novembre, la Chine a annoncé avoir signé un tel traité avec la Corée du Sud et l’Australie. Les implications sont importantes puisque l’Australie fait elle même partie du projet TPP soutenu pas les américains.
Six accords de libre-échange ont été déjà été signés séparément par la Thaïlande avec l’Australie, la Chine (2003), l’Inde, la Nouvelle-Zélande et les 10 pays membres de l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est).
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