Six semaines après le passage du cyclone Nargis dans le delta de l’Ayeyarwady, en Birmanie, un grand nombre de rescapés ne bénéficient toujours pas d’un hébergement d’urgence adéquat pour les protéger des fortes averses de la mousson, et sont ainsi plus exposés au risque de contracter des maladies.
Un grand nombre de rescapés ont tenté de se construire un hébergement pour se protéger des intempéries à l’aide de matériaux naturels traditionnels, tels que les feuilles de palmier, selon plusieurs travailleurs humanitaires, qui se sont déplacés à travers le delta touché. Ces refuges improvisés, ont-ils expliqué, ne résistent toutefois pas à l’eau.
« Six semaines plus tard, il y a encore des gens qui n’ont pas de toit sur la tête », a déploré John Sparrow, porte-parole de la Fédération internationale de la Croix-Rouge (FICR), qui vient de revenir du delta. « Beaucoup de gens ont monté des refuges temporaires, mais ils restent malgré tout totalement démunis. Ils sont tenaces, et ils font tout ce qu’ils peuvent par eux-mêmes, mais cela ne suffit pas ».
À l’heure actuelle, les organisations humanitaires distribuent des bâches de protection, mais leurs efforts ont été entravés par la pénurie de matériel, aggravée par une demande en équipements d’urgence semblables pour les rescapés du tremblement de terre de Sichuan, en Chine voisine.
Problèmes logistiques
Les organisations sont également confrontées à des difficultés logistiques pour acheminer les bâches dans les régions touchées et les remettre entre les mains des rescapés. La semaine dernière, selon les estimations de la FICR, seules 22 pour cent des personnes dans le besoin s’étaient vu délivrer du matériel de secours par les organisations internationales.
Et s’il est vrai que la distribution s’accélère désormais, le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) estime qu’il faudrait encore 500 000 bâches supplémentaires.
Le 13 juin, selon les estimations d’OCHA, seuls 160 000 ménages avaient reçu un hébergement d’urgence, généralement sous la forme d’une bâche de plastique. Graham Eastmond, installé à Bangkok, occupe le poste de coordinateur à l’Emergency Shelter Cluster, un groupe de coordination, composé d’agences des Nations Unies et d’organisations non-gouvernementales (ONG).
Selon lui, d’autres bâches arriveront bientôt sur place. Déjà, le département américain de la Défense en a commandé environ 125 000, qui seront prêtes à être distribuées dès le 19 juin, et 110 000 autres, destinées à la FICR, sont déjà en route pour le Myanmar.
La plupart des rescapés qui ont reçu ces bâches ont encore besoin de se voir délivrer des nécessaires ménagers, et notamment des moustiquaires, des couvertures et autres équipements, selon M. Eastmond.
Le cyclone Nargis (et l’onde de tempête qui l’a suivi) a fait quelque 133 000 morts et disparus, lorsqu’il s’est abattu sur le pays les 2 et 3 mai derniers, laissant environ 2,4 millions de personnes entièrement démunies.
Besoin d’évaluations
Les organisations humanitaires ne connaissent toujours pas le nombre exact des foyers gravement endommagés ou totalement détruits au cours de la catastrophe, mais elles sont en train de réaliser un état des lieux minutieux, qui devrait être achevé d’ici au 24 juin.
Cette initiative mobilise plus de 250 représentants des agences des Nations Unies, de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), de la Banque mondiale, de la Banque asiatique de développement, de la FICR, et de 18 ministères birmans ; dans le cadre de cette initiative, des évaluations de terrain détaillées seront menées dans les 30 communes les plus gravement touchées.
« Nous avons des difficultés, de manière générale, avec le flux d’information », a indiqué M. Eastmond à IRIN, ajoutant que l’évaluation serait fort utile pour permettre aux organisations de mieux adapter leur intervention.
Pour l’instant, d’après les estimations de l’Emergency Shelter Cluster, environ 480 000 familles de la région touchée ont perdu leur moyen d’hébergement, bien qu’il s’agisse d’une statistique préliminaire et très approximative, prévient l’organisme.
Des dizaines de milliers de rescapés ont quitté les campements temporaires pour retourner dans leurs villages ; selon un rapport publié le 9 juin par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), les conditions de vie des rapatriés sont « extrêmement déplorables » dans certains villages de Labutta, une région durement frappée par la catastrophe, où se sont rendues les équipes de terrain de l’agence onusienne, et il est urgent d’envoyer d’autres bâches sur place.
M. Sparrow a rapporté qu’il avait rencontré une femme, mère de cinq enfants, dont un nourrisson de sept mois, qui avait réussi à monter un petit refuge ouvert.
Lorsqu’il lui a demandé comment elle protégeait son bébé des pluies de la mousson, celui-ci ayant déjà développé des problèmes respiratoires, la jeune mère a répondu : « je le serre plus fort ».
Une autre travailleuse humanitaire a indiqué que les bénéficiaires des bâches les utilisaient essentiellement pour protéger de l’eau les structures qu’ils avaient construites eux-mêmes à partir de matériaux naturels.
« Quand ils les reçoivent, ils disent « merci, maintenant, nous allons vraiment bien dormir ce soir » », a-t-elle expliqué.
Pourtant, selon M. Eastmond, alors même que la distribution des bâches s’accélère, les organisations commencent à débattre de la meilleure manière de couvrir les besoins des populations en hébergement à long terme.
Des équipes sont en train de recenser dans le détail les matériaux de construction en circulation sur les marchés locaux, et d’identifier les travailleurs qualifiés susceptibles d’aider à la construction d’habitations.
« La prochaine étape sera celle du relèvement rapide, au cours de laquelle les populations recevront du matériel pour reconstruire leurs maisons. Nous devrions tenter de déterminer la meilleure façon de le faire, ce qu’un kit standard d’aide devrait contenir, en ayant pour objectif de produire un refuge adapté pour une famille. Il y a beaucoup à faire », a-t-il estimé.
Source : IRIN