Crise politique de longue durée, ralentissement économique, l’ambiance est plutôt morose dans le royaume et la population commence à en faire les frais. En effet une récente étude révèle que la qualité de vie actuelle des Thaïlandais enregistre la plus forte baisse des six dernières années.
L’université de la chambre du commerce thaïlandais (UTCC) a mené récemment une étude aux résultats préoccupants concernant la santé financière des travailleurs aux revenus modestes (inférieurs à 15 000 baths). Sur les 1 200 personnes interviewées, 80% d’entre elles disent ne pas avoir suffisamment de revenus pour couvrir leurs dépenses, et 93,7% constatent une augmentation de leur endettement.
Une progression de l’endettement
Un phénomène qui n’est somme toute pas récent en Thaïlande, avec une progression constante depuis les années 90, mais qui a été exacerbé par les troubles politique de ces derniers mois.
On note une dette moyenne par ménage de 106 216 baths (environ 2400 euros) en avril 2014, soit une progression de l’endettement de 17,7% par rapport à 1999 (avec 87 339 baths), avec une évolution nettement prononcé de 7,6 point uniquement sur 2013- 2014.
L’endettement des ménages thaïlandais à atteint 80% du PIB en 2013, contre 64% en 2011. Le montant des « NPL » (non performing loans), c’est à dire des crédits dont le remboursement est suspendu (en clair les ménages qui ne peuvent plus payer) est estimé à 9 milliards de dollars, en hausse de 6% depuis le début de l’année, selon la Banque de Thaïlande.
La crise politique a eu en effet un impact important sur les entreprises du royaume qui fonctionnent, depuis décembre dernier, au ralenti. Un phénomène qui a réduit au minimum la possibilité d’heures supplémentaires, qui sont des sources de revenus supplémentaires pour les ménages, et qui aussi gelé les recrutements.
« Nous constatons actuellement un retard dans le recrutement de nouveaux employés ainsi qu’une réduction des heures de travail pour le personnel déjà employé »
analyse M.Thanavath, responsable de l’étude de l’UTCC.
Aucun licenciement économique n’est pour l’heure intervenu dans les entreprises, stabilisant ainsi la courbe de l’endettement. Mais si de telles mesures étaient prises elles pourraient avoir des conséquences d’envergures pour les salariés les plus précaires.
D’autres causes à prendre en considération
Mais réduire la progression de l’endettement et son boom récent uniquement à la crise politique serait une analyse trop réductrice.
D’autres facteurs peuvent en effet expliquer en partie cette augmentation. A commencer par l’augmentation du salaire minimum par le gouvernement en 2012 à 300 baht par jour.
Cette augmentation du pouvoir d’achat a eu une conséquence directe sur la consommation de bien à forte valeurs ajoutés de types smartphone mais aussi sur l’accès à la propriété, entrainant ainsi une hausse de l’endettement.
En parallèle de cette réévaluation sociale des salaires, le gouvernement a lancé en 2012 une politique d’aide fiscale à l’achat à la première voiture. Cette politique taxée de populiste par certains a dopé le marché de l’automobile, mais aussi entrainé une augmentation rapide de l’endettement des foyers aux revenus les plus modestes.
Avec l’augmentation du niveau de vie, l’endettement des foyers thaïlandais est un phénomène normal dans le développement économique du pays, mais le boom récent demeure préoccupant pour de nombreuses personnes qui vivent avec le salaire minimum.
Les ménages asiatiques sont-ils trop endettés ?
Cela pourrait bien être le cas selon une note récente de la COFACE qui souligne une hausse générale et substantielle de l’endettement des ménages dans plusieurs pays de la région.
Les disparités sont assez importantes, allant de 112% du revenu disponible pour la Thaïlande à 194% pour la Malaisie, à comparer avec le taux de 130% des ménages américains avant la crise des « subprimes ».
Dans sa récente version de l’évaluation des risques pays, la COFACE souligne les risques croissants de crises liés à l’augmentation de l’endettement des ménages.
La Malaisie, Corée du Sud, Singapour et la Thaïlande ont atteint un niveau de dette des ménages comparable à celle des États-Unis au moment de la crise des « subprimes »
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