La croissance reste robuste dans les pays en développement d’Asie de l’Est, mais continue de s’atténuer en raison principalement du fléchissement de la demande extérieure, ce qui fait ressortir la nécessité pour les États de recentrer leurs politiques sur des programmes de réforme afin d’accroître la demande intérieure et la productivité, déclare la Banque mondiale dans son dernier Rapport sur l’évolution économique récente des pays d’Asie orientale et du Pacifique.
Selon les projections du rapport, qui est publié deux fois par an, le PIB réel des pays en développement d’Asie de l’Est augmentera de 8,2 % en 2011 (4,7 % Chine exclue) et de 7,8 % en 2012, du fait des incertitudes de la situation en Europe et du ralentissement de la croissance mondiale. La principale contribution à la croissance de la région provient de la demande intérieure des pays à revenu intermédiaire, bien que celle-ci commence à fléchir du fait de la normalisation des politiques monétaire et budgétaire.
« Une baisse de la croissance en Europe causée par l’austérité budgétaire et la nécessité pour les banques de relever le niveau de leurs fonds propres aurait des répercussions en Asie de l’Est. Une réduction du crédit offert par les banques européennes pourrait aussi affecter les flux de capitaux à destination de l’Asie de l’Est, mais le niveau élevé de leurs réserves et l’excédent de leur solde extérieur courant protègent la plupart des pays de la région de l’impact d’un éventuel renouveau des tensions financières, »
déclare Bert Hofman, économiste en chef de la Banque mondiale pour la Région Asie orientale et Pacifique.
Selon le rapport, le ralentissement de la croissance de la région a été particulièrement prononcé dans la production industrielle. Les exportations des principales chaînes d’approvisionnement industrielles régionales commencent à diminuer, surtout dans l’électronique. La demande de produits de base et de matières premières demeure forte, ce qui aide les économies riches en ressources naturelles à maintenir des niveaux élevés d’exportations et de croissance du PIB.
Alors que la demande des pays développés diminue, la Chine voit sa part des importations mondiales augmenter, ce qui en fait une source de plus en plus importante de la demande mondiale. La part croissante des biens de consommation dans les importations chinoises bénéficie aussi aux exportateurs de produits manufacturés de la région.
Les incertitudes de la situation mondiale et les conséquences des catastrophes naturelles vont peser sur les perspectives de croissance de l’Asie de l’Est dans la période à venir. La lenteur de la résolution des problèmes d’endettement de la zone euro a intensifié les inquiétudes des investisseurs au sujet de la croissance et de la stabilité mondiales. À mesure que les capitaux quittaient les marchés émergents pour des destinations relativement plus sûres, les flux d’investissements de portefeuille se sont inversés, ce qui a fait baisser les marchés boursiers d’Asie de l’Est.
Les conséquences des inondations qui ont frappé plusieurs pays vont sans doute aussi peser sur la croissance cette année.
Bien que l’estimation des dégâts ne soit pas encore achevée, la croissance du PIB de la Thaïlande a été révisée en baisse à 2,4 % pour 2011 du fait de l’inondation généralisée du pays. Les pertes de production se font sentir dans toute la région, à mesure que l’impact du désastre se propage le long des chaînes d’approvisionnement industrielles. La reconstruction qui va suivre l’inondation contribuera sans doute à la croissance en 2012, mais le retour de la production de la région à ses niveaux d’avant la catastrophe dépendra en partie de la robustesse de la demande mondiale de produits électroniques et d’automobiles.
« Sur la base des prévisions de croissance actuelle, 38 millions de personnes devraient sortir de la pauvreté dans les pays en développement d’Asie de l’Est d’ici à fin 2011. Nous sommes préoccupés par les effets possibles de la situation économique mondiale sur les populations vulnérables de la région, car les efforts de réduction de la pauvreté risquent d’être contrecarrés par des événements tels qu’une brusque hausse des prix des denrées alimentaires, conjuguée à la faible croissance des revenus »
a dit Hofman.
Réagissant au ralentissement de l’économie mondiale, les responsables d’Asie de l’Est réexaminent leurs politiques.
Selon le rapport, la difficulté essentielle à court terme consistera à trouver un juste équilibre entre la relance de la croissance et la maîtrise des effets liés à une situation mondiale marquée par l’incertitude. Les décideurs vont sans doute surseoir à tout nouveau resserrement des politiques et se tenir prêts à réagir en cas de chocs défavorables sur la croissance, ou à l’éventualité improbable d’une résolution désordonnée de la crise de la dette de la zone euro. Dans la plupart des pays à revenu intermédiaire, la situation financière, bien que moins robuste qu’avant la crise de 2008, offre encore un espace suffisant pour une relance budgétaire si celle-ci devait s’avérer nécessaire. Cependant, une relance seule ne suffira pas face aux perspectives d’une croissance mondiale durablement médiocre.
« Les États peuvent saisir cette occasion de recentrer leurs politiques sur des réformes qui amélioreront la croissance à moyen et à long terme. Des investissements plus élevés dans l’infrastructure, l’éducation et les régimes de sécurité sociale peuvent aider les pays à accroître leur productivité et à évoluer vers une production à plus forte valeur ajoutée, »
a déclaré Ekaterina Vostroknutova, économiste senior et principal auteur du rapport. « Les éventuels programmes de relance devront être budgétairement viables, bien ciblés et conçus pour encourager la transformation structurelle indispensable à une croissance plus forte et alimentée par la demande intérieure. »
Lorsque le niveau des investissements est déjà très élevé, la priorité doit être d’améliorer leur qualité et leur efficacité tout en réorientant la croissance vers la consommation intérieure, selon le rapport. Il devient aussi de plus en plus important pour la région d’accroître les investissements dans la prévention et la gestion des catastrophes naturelles.