Face aux impacts désastreux du tourisme de masse sur l’environnement, de plus en plus de visiteurs en Thaïlande optent pour le tourisme dit « régénératif », qui encourage des voyages responsables et vise à laisser un impact positif sur les destinations visitées.
Le tourisme régénératif : voyager en préservant l’environnement
Partir en vacances implique un coût environnemental que beaucoup choisissent désormais de ne plus ignorer : empreinte carbone des vols en avion, consommation énergétique des hébergements, ou encore impact négatif de certaines activités touristiques sur l’environnement et sur l’économie locale.
En 2021, un sondage de l’IFOP a révélé que 44% des Français sont prêts à dépenser plus d’argent durant leur séjour, si cela leur permet de voyager de manière écoresponsable et durable.
Ainsi, pour contrebalancer les effets destructeurs du tourisme, certains globe-trotters adoptent un nouveau mode de déplacement : le tourisme régénératif. Ce mode de voyage durable a pour objectif d’avoir une influence positive sur sa destination. Au-delà de simplement contribuer à la conservation de celle-ci, ce phénomène implique une pleine conscience de son impact sur la nature et la société locales, afin d’agir pour y remédier.
Ce n’est pas seulement l’envie de ne pas détériorer son lieu de vacances ; c’est ambitionner de le laisser dans un meilleur état que celui dans lequel on l’a trouvé, tout en soutenant les communautés autochtones.
À l’aune du sur-tourisme et de ses implications, les voyageurs se considèrent désormais comme faisant partie du problème, mais aussi de la solution. Nombre d’entre eux font donc leur possible pour faire de leur périple une occasion de restaurer la nature.
Les sanctuaires d’éléphants en Thaïlande, symboles d’une nouvelle approche du voyage
La Thaïlande est bien connue pour son tourisme animalier, qui, depuis presque quatre décennies, repose sur ses nombreux centres et sanctuaires à éléphants. Avec ses 3800 individus en captivité, elle représente un pays pivot dans la conservation de l’espèce en danger qu’est l’éléphant asiatique.
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Pourtant, dans les destinations prisées par les touristes, on trouve de plus en plus de publicités pour des excursions “sans contact avec les animaux” – un argument marketing aux antipodes de celui qui, il y a encore quelques années, proposait la folle expérience de monter sur un éléphant.
Ce changement radical dans la manière de présenter les excursions avec la faune va de pair avec des voyageurs conscients des conditions atroces dans lesquelles elles se déroulent, et qui refusent de cautionner cette industrie.
Maints sanctuaires prétendent avoir sauvé leurs éléphants de l’exploitation mais omettent de préciser que, pour pouvoir proposer de les monter, de les nourrir ou encore de les laver, les animaux doivent être apprivoisés par le biais d’un dressage souvent cruel.
En effet, afin qu’ils se soumettent et acceptent d’être au contact de l’homme tout au long de la journée, les éléphants subissent dès leur plus jeune âge des techniques de conditionnement violentes pour “briser leur esprit”.
Le stress occasionné par ce dressage représente un danger pour les animaux, mais également pour les visiteurs, comme le prouve l’accident tragique qu’a subi une touriste espagnole en janvier dernier. Lors d’une baignade organisée par le Koh Yao Elephant Care Centre, Blanca Ojanguren García a trouvé la mort après avoir été poussée par un éléphant « paniqué » et surstimulé par le contact avec l’humain.
À la Thailand Tourism Authority, il n’y a actuellement pas de consensus sur de potentielles règles à respecter pour qualifier son centre de “sanctuaire”. N’importe qui peut ainsi profiter de ce facteur d’attractivité sans par la suite fournir d’efforts pour préserver le bien-être animal.
Participer activement à la préservation des éléphants, au-delà du simple boycott
Des révélations sur les conditions de vie des pachydermes s’est ensuivi un sursaut éthique qui explique pourquoi le tourisme régénératif prend de l’ampleur en Thaïlande. Après une réflexion consciente sur où va leur argent, il est devenu impensable pour beaucoup de touristes de soutenir financièrement une compagnie qui maltraite ses animaux.
En Thaïlande, un nombre croissant de visiteurs veut aller plus loin que le simple boycott des camps abusifs ; il s’agit aujourd’hui de prendre part à un phénomène de grande ampleur visant à favoriser la protection animale et les communautés qui en vivent.
Par exemple, le sanctuaire Asian Elephant Projects, à Chiang Mai, propose du bénévolat dans la jungle aux côtés de la tribu traditionnelle Karen. Encadrés par un guide durant plusieurs jours de randonnée, les volontaires observent les pachydermes, préparent leur nourriture médicinale et prennent part à des projets pour améliorer leur vie sur le long terme.
Le Chang Chill Elephant Sanctuary propose également du volontariat pour les étudiants, où leur rôle est de planter des arbres afin de nourrir les éléphants ; une activité qui allie amusement et aide concrète aux soignants dans l’une des tâches les plus difficiles.
Un effet “boule de neige” qui bouleverse toute l’industrie du tourisme
Ce changement dans la manière de voyager ne touche pas que les sanctuaires animaliers : face à des visiteurs plus éduqués, c’est toute l’industrie du tourisme qui doit repenser sa façon de fonctionner.
Ainsi, les offices de tourisme et compagnies offrant des excursions revoient leurs critères et se tournent vers des partenaires promouvant ouvertement le bien-être des pachydermes et la protection de leur habitat naturel.
Grâce à ces recherches plus poussées, on trouve conséquemment moins d’offres proposant de toucher les animaux, moins de publicités mettant en avant des familles à dos d’éléphant, et, de ce fait, un changement drastique dans les façons de faire des “sanctuaires”.
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C’est à travers le comportement des consommateurs qu’une industrie évolue, et le tourisme régénératif en est un exemple frappant. Les voyageurs d’aujourd’hui ont des préoccupations croissantes concernant la planète et l’environnement, privilégiant choix éthiques au simple divertissement.
Les effets bénéfiques sur les sanctuaires thaïlandais sont la preuve qu’il est possible de visiter une destination tout en contribuant à terme au bien-être local – un espoir qui rivalise avec la “fatalité” du tourisme de masse.
Conseils pratiques : Comment sélectionner la meilleure expérience pour observer les éléphants ?
- Privilégier les sanctuaires sans contact : Ces lieux permettent aux éléphants d’évoluer librement sans être soumis à des activités de divertissement. Ne pas réserver d’excursions si elles promettent de nourrir, toucher, laver, ou monter les éléphants. Pour une rencontre réellement éthique avec les animaux, il faut uniquement les observer, sans entraver leur comportement naturel.
- Choisir une expérience respectueuse des animaux : Refuser toute expérience qui promet un “spectacle” amusant avec des éléphants faisant des acrobaties. Ceci est valable également pour les performances qui mettent en scène des tigres ou des crocodiles, souvent drogués ou battus pour assurer leur obéissance. Privilégier le bénévolat, où l’expérience est axée sur la contribution au bien-être de l’animal plutôt qu’au divertissement.
- S’informer sur l’origine des éléphants : Se renseigner sur la provenance des éléphants du sanctuaire. Les éléphants sauvages capturés ou issus du braconnage peuvent avoir subi des traitements cruels. Un sanctuaire éthique privilégie les éléphants issus de sauvetages ou de situations de maltraitance.
- Vérifier les pratiques du sanctuaire : Faire des recherches au-delà du site Internet du sanctuaire (vérifier les commentaires des touristes, les photos postées sur les réseaux sociaux, la transparence de la compagnie, les potentielles certifications d’associations animalières…), afin de s’assurer qu’il ne propose pas d’activités comme des bains ou des nourrissages, stressantes pour les animaux.
Quelques idées de sanctuaires éthiques appréciés du tourisme régénératif :
- Chai Lai Orchid (Chiang Mai)
- Elephant Hills (Khao Sok)
- Pattaya Elephant Sanctuary (Pattaya).
Sources :
How the rise of regenerative travel is changing Thailand’s elephant tourism for the better | Euronews