Move Forward, le parti qui a largement remporté les dernières élections générales en Thaïlande affiche volontiers une image progressiste et avant-gardiste que reflète d’ailleurs son nom : avancer, ou aller de l’avant.

Mais en ce moment il est plutôt question de faire machine arrière sur une des mesures les plus populaires du précédent gouvernement : la légalisation du cannabis.

Avec l’arrivée du nouveau gouvernement mené par Move Forward, la politique sur le cannabis va évoluer. Entre retour à l’interdiction et maintien de la légalisation, Move Forward est à la recherche d’une nouvelle voie.

C’est l’une des priorités du futur gouvernement : la réinscription du cannabis sur la liste des stupéfiants, selon le docteur Wayo Assawarungruang, membre de la commission de travail sur la santé publique au sein de Move Forward. Cette mesure fait d’ailleurs parti du protocole d’accord (MoU) sur la gouvernance signée par Move Foward et ses alliés de la coalition. 

Le docteur Wayo précise cependant que le commerce et la consommation du cannabis seront encadrés mais qu’une période de transition sera mise en place pour permettre aux entreprises liées au cannabis et exerçant légalement de s’adapter aux nouveaux règlements.

Depuis 1961 et la convention unique sur les stupéfiants, le cannabis était totalement interdit en Thaïlande. En 2019 sous la pression du parti Bhumjaithai le cannabis a été légalisé à des fins médicales en premier lieu puis, en 2022, totalement légalisé.

Depuis la dépénalisation de la production, de la vente et de la consommation (en principale médicale) de cannabis par le gouvernement thaïlandais en juin 2022, une vaste industrie non réglementée a vu le jour.

Chuwit Kamolvisit dénonciateur de premier plan, s’est plaint que plus de 100 000 magasins de marijuana aient demandé aux autorités d’opérer, dont certains à proximité des écoles.

En l’absence d’une règlementation sur son utilisation le cannabis s’est rapidement installé partout en Thaïlande. Cela a conduit à une explosion de la vente du cannabis et de la multiplication des commerces. De même, on trouve du cannabis dans des produits de consommation courante : boissons, nourritures, cosmétiques.

Une banalisation inquiétante

Cette banalisation à grande échelle suscite des critiques et des inquiétudes, notamment dans le milieu médical, qui s’inquiète déjà des abus de cette substance. En effet, si l’usage du cannabis est légalement réservé à des fins médicales, beaucoup de Thaïlandais en consomment à titre privé à des fins récréatives, profitant de sa plus grande accessibilité. Il est cependant interdit de fumer du cannabis en public, et sa vente aux mineurs ou aux femmes enceintes est sévèrement punie par la loi.

Le projet de réinscrire le cannabis comme stupéfiant aurait pour conséquence la diminution de l’ordre des 70% des stands et magasins de marijuana. Selon le Dr Wayo, les entreprises qui devront fermer sont celle ayant profité du vide juridique et du manque de contrôle.

Il indique que Move Forward va « adopter des lois pour régir les 30% des magasins qui resteront ».

Le cadre juridique et le calendrier n’ont toutefois pas été révélés. Move Forward mène des consultations auprès des différentes parties en présence : consommateurs, commerçants, médecins, pro et anti-marijuana…

Le cannabis est également perçu comme un moyen d’attirer les touristes étrangers, qui pourraient être tentés de découvrir cette nouvelle facette de la Thaïlande. Certains cafés ou galeries d’art proposent ainsi du cannabis à la vente, mais pas à la consommation sur place. Les touristes doivent toutefois respecter les règles en vigueur et ne pas sortir du territoire avec du cannabis ou ses graines.

Entre les intérêts économiques, et notamment l’attractivité touristique que représente la vente libre du cannabis à usage récréatif, et les enjeux de santé publique, Move Forward est à la recherche d’un difficile équilibre.

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