BANGKOK – Le Premier ministre Prayuth Chan-ocha et neuf membres de son gouvernement ont facilement remporté le vote sur une motion de censure défendue par l’opposition au Parlement.
M.Prayuth a obtenu le soutien de 272 législateurs, tandis que 206 ont voté contre lui et trois se sont abstenus.
Une victoire prévisible car la coalition au pouvoir détient une majorité significative à la chambre basse et n’a jamais été considérée comme menacée par ce vote.
La motion de censure est la deuxième que Prayuth et son gouvernement ont du affronter ce mois-ci. En février 2020, le Premier ministre et cinq membres du cabinet ont largement surmonté un débat sur la censure après que de nombreux membres de l’opposition ont choisi de s’abstenir.
Le dernier échec de la censure contre le Premier ministre et son cabinet pourrait cependant favoriser le retour des rassemblements pro-démocratie mis en veille depuis le début de la seconde vague de Covid-19.
Les rassemblements politiques ont été spécifiquement interdits le 28 décembre.
La démission de Prayuth et de ses ministres est l’une des trois principales revendications formulées par les jeunes manifestants depuis juillet 2020.
Vendredi, une manifestation dirigée par des jeunes devant le parlement a tenté sans succès de faire pression sur les législateurs engagés dans le débat de quatre jours sur la censure.
Mais elle n’a attiré que quelques centaines de personnes – un taux de participation beaucoup plus faible par rapport aux rassemblements de l’année dernière avant la résurgence du coronavirus en décembre.
Le débat, qui a débuté mardi et s’est terminé vendredi, a vu le Premier ministre et son cabinet esquiver les arguments plus que s’engager avec des critiques.
Vaccination tardive
Un sujet particulièrement sensible était la politique de vaccination tardive de la Thaïlande contre le COVID-19.
« Je crains que les commentaires sur les vaccins ne causent des problèmes – je ne veux pas que cela soit politisé », a déclaré M.Prayuth après qu’un membre du parti d’opposition Move Forward ait remis en question la stratégie de distribution des vaccins du gouvernement.
Les plans de vaccination de la Thaïlande ont été critiqués en janvier, lorsque Thanathorn Juangroongruangkit, un ancien chef d’un parti d’opposition interdit.
Il a utilisé une diffusion un direct sur Facebook pour critiquer l’attribution presque exclusive du gouvernement à Siam Bioscience des contrats de production des vaccins COVID-19 fabriqués au niveau national en partenariat avec AstraZeneca.
Siam Bioscience appartient en effet au Bureau de la couronne (Crown Property Bureau) un organisme qui gère les avoirs du roi Maha Vajiralongkorn.
Le ministère de l’Économie et de la Société numérique a demandé au tribunal d’ordonner la suppression de la publication Facebook de Thanathorn au motif qu’elle violait la loi de lèse-majesté du royaume. Mais le 8 février, le tribunal a rejeté la demande de renvoi.
La stratégie de déploiement du vaccin est essentielle pour préparer la reprise de l’économie thaïlandaise très dépendante du tourisme.
Avec pratiquement aucune transmission locale pendant la majeure partie de 2020, le royaume a connu une reprise des cas confirmés à la mi-décembre.
Le retour des manifestations
Les manifestants ont respecté l’interdiction de regroupement décidée le 28 décembre jusqu’à ce que les autorités commencent à utiliser des procédures criminelles contre des militants, notamment la très sévère loi de lèse-majesté et la sédition.
Le leader étudiant Parit « Penguin » Chiwarak, l’avocat des droits de l’homme Arnon Nampa et deux autres militants de premier plan se sont vu refuser leur libération sous caution le 9 février et sont détenus en détention provisoire pour lèse-majesté et d’autres chefs d’accusation.
Arnon figure cette année sur la liste 2021 Time100 Next des «leaders émergents qui façonnent l’avenir».
Les personnes reconnues coupables de lèse-majesté encourent des peines de prison allant jusqu’à 15 ans par infraction, avec des peines cumulées possibles. N’importe qui peut porter plainte pour lèse-majesté auprès de la police, et les ultraroyalistes et les représentants du gouvernement ont été occupés ces derniers mois à déposer des plaintes contre les jeunes manifestants les plus en vue.
Au moins 58 militants font face à diverses accusations pénales passibles de lourdes sanctions.
Pour protester contre la récente reprise de l’utilisation de la loi controversée, le groupe d’activistes The People a ignoré l’interdiction de manifester en vigueur et a commencé à organiser des rassemblements.
Une manifestation le 13 février près du Grand Palais a dégénéré en une bagarre entre les manifestants et la police, entraînant plusieurs arrestations.