Un nouveau rapport de l’OIT met en lumière des lacunes importantes dans l’industrie de la pêche de la Thaïlande en matière de respect des lois sur le travail.
Le rapport, co-rédigé par l’Organisation internationale du Travail (OIT) et le Centre asiatique de recherche sur les migrations à l’Université de Chulalongkorn, est basé sur 596 entretiens, ce qui en fait la plus importante étude à ce jour sur les conditions de travail dans le secteur de la pêche thaïlandaise.
Alors que la plupart des travailleurs interrogés ont déclaré être entré dans le secteur de la pêche volontairement, 32 répondants (5,4%) ont déclaré qu’ils ont été trompés ou forcés à travailler dans la pêche.
Le problème est particulièrement prononcé chez les pêcheurs travaillant en mer, et embarqués sur des navires long-courriers, avec près d’un sur six des pêcheurs long-courriers interrogés (16 %) indiquant qu’ils n’avaient pas volontairement décidé de travailler sur un bateau de pêche.
L’étude a révélé qu’environ 17% des personnes interrogées ont déclaré travailler contre leur volonté, se retrouvant incapables de quitter leur travail en raison de la menace de sanctions.
Ces travailleurs se divisent en deux groupes: ceux qui n’ont pas pu quitter leur poste à cause d’une pénalité financière (12%), et ceux qui ont cité d’autres raisons, y compris la menace de violence ou de dénonciation aux autorités (4,9%). Les pires conditions de travail étant pour ceux qui ont été en mer pendant plus d’un mois : près de 25% ont été soumis à des pratiques de travail déloyales ou coercitives.
Des enfants parfois agés de moins de 15 ans
L’enquête a également démontré la présence de 33 enfants de moins de 18 ans travaillant à bord des navires de pêche, dont sept de moins de 15 ans. En vertu de la loi thaïlandaise sur le travail, les personnes âgées de 15 ans et plus peuvent travailler à bord des navires, dans certaines circonstances, notamment si le travail n’est pas considéré comme dangereux (la Thaïlande n’a pas ratifié cette Convention de l’OIT n ° 188 de 2007 qui fixe le cadre du travail dans le secteur de la pêche).
Toutefois, le rapport note que a loi actuelle représente « une zone grise en ce qui concerne le travail des enfants, parce que certains travaux dans la pêche peuvent être considérés comme dangereux pour les enfants, notamment le travail de nuit ».
Pas de contrat de travail
Le rapport conclut que la plupart des problèmes rencontrés par les pêcheurs sont aggravés par l’absence de contrats de travail : 94 % des personnes interrogées n’avaient pas de contrat écrit. En tant que tels, les horaires et les conditions de paiement, y compris la méthode de calcul de l’indemnité (comprenant généralement une part de la vente de la prise), la fréquence des salaires et des déductions, ne sont pas clairement définis.
D’autres facteurs entrant en jeu comprennent la situation irrégulière des pêcheurs migrants, et l’absence de tout représentant des travailleurs.
« Cette meilleure compréhension de la situation aidera à formuler des réponses politiques fondées sur des preuves pour réglementer le recrutement et l’emploi des pêcheurs afin de prévenir et d’éliminer toutes les formes de travail inacceptables »
a déclaré le professeur Supang Chantavanich, directeur du Centre asiatique de recherche sur les migrations.
«L’amélioration des conditions de travail est également essentiel pour faire face aux pénuries de main d’oeuvre dans le secteur de la pêche, et assurer la durabilité de l’industrie ».
La pêche un secteur important de l’économie thaïlandaise
La Thaïlande est un fournisseur majeur dans le commerce mondial des produits de la pêche, avec des exportations de poissons de plus de 7 milliards de dollars par an au cours des dernières années. L’Association nationale des pêches de la Thaïlande (NFAT) a estimé qu’un total de 142 845 pêcheurs sont employés par leurs membres, mais les entreprises liées à la pêche et les industries connexes emploient beaucoup plus.
Les préoccupations concernant l’abus et l’exploitation des pêcheurs, des pêcheurs migrants en particulier, ont conduit à des appels de groupes des droits humains, et de la communauté internationale pour renforcer la régulation et la protection dans ce secteur.
Les pêcheurs interrogés étaient en majorité des migrants irréguliers en provenance du Myanmar et du Cambodge; et seulement 8% étaient originaires Thaïlande. La recherche a été effectuée entre Mai et Septembre 2012 dans quatre provinces côtières; Ranong, Rayong, Samut Sakhon et Songkhla.
Le sondage a été organisé par une action coordonnée de l’OIT pour protéger les droits des travailleurs migrants dans la sous-région du Grand Mékong (le projet TRIANGLE GMS) en collaboration avec le Centre asiatique de recherche sur les migrations à l’Institut d’études asiatiques de l’Université Chulalongkorn.